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chap. 5e.
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desséchement des marais.

struction d’un grand nombre de ponts, on a cherché à y remédier par le desséchement au moyen des rigoles souterraines ou fossés couverts.

Les rigoles souterraines, communément désignées sous le nom de coulisses, sont des fosses garnis de pierres ou d’autres matières qui ont assez de solidité ou de durée pour maintenir les vides par lesquels l’eau doit s’écouler. On recouvre le tout de mousse, de gazon et de terre, de manière que la charrue ou la voiture passent par-dessus les coulisses sans jamais être arrêtées, comme elles le sont par les fossés ouverts.

L’usage de ces petits aqueducs pour le dessèchement des terres remonte à l’antiquité la plus reculée. Les Perses recueillent encore aujourd’hui les fruits et les avantages d’un grand nombre de ces canaux, construits, à une époque inconnue, dans des terrains humides et inondés, dont les eaux servent à arroser et enrichir d’autres terrains qui étaient trop secs. Caton, Palladius, Columelle, Pline, etc., parlent de ces aqueducs souterrains employés de leur temps pour le dessèchement des terres cultivables inondées et dont la culture était gênée par la stagnation des eaux. Après avoir ouvert les fossés, on les remplissait en pierres sèches, ou en branches tressées grossièrement, puis on les couvrait en pierres plates ou en gazon. Les coulisses des anciens avaient de 0m 90 à 1m et 1m 20 de profondeur. On ne leur donne plus que 0m 60 à 0m 70 ; mais les grandes coulisses qui doivent recevoir les eaux des coulisses transversales sont plus larges et plus profondes.

Aujourd’hui, les coulisses se font, comme chez les anciens, en pierres, et, à défaut de pierres, en fascines ou en branchages, et dans beaucoup de pays tout simplement en gazon. Pour faire les coulisses en fascines (fig. 99), on place, de distance en distance, dans le fond du fossé, deux pieux croisés en chevalet ou en croix de Saint-André, destinés à porter les fascines, au-dessus desquelles on met de la paille, de la mousse ou des feuilles, que l’on recouvre ensuite de terre. Suivant les localités, en emploie indistinctement les fascines de chêne, d’épines noires, de saule, d’orme, d’aune, de peupliers, etc., etc. Ces coulisses durent 30 à 40 ans et au-delà, suivant l’essence du bois des fascines, et la grosseur des branches.

Dans le Lancashire et dans le Buckinghamshire, on dessèche les prairies par des coulisses étroites (fig. 100), pratiquées avec un fort louchet ; mais dans beaucoup d’endroits, on se sert avec plus de succès de la charrue-taupe.

Les coulisses en pierre (fig. 101) durent plusieurs siècles. Ainsi, celles qui ont été faites par les anciens en Grèce, en Asie, en Perse, en Syrie, etc., sont encore bien conservées et remplissent parfaitement leurs fonctions sans que jamais on soit obligé d’y travailler. La figure en présente de plusieurs genres de construction, qui n’ont pas besoin de description spéciale, et entre lesquelles on peut choisir selon les besoins des localités et les matériaux disponibles.

L’argile cuite ou terre à briques et à poteries peut aussi servir à établir des coulisses très-durables, très-faciles à poser, et qui, pour certains pays, seront très-peu dispendieuses. La fig. 102 en offre de plusieurs formes. Il serait à désirer qu’on se mit à en fabriquer dans un grand nombre de nos départemens ; en attendant M. Gourlier a établi à Vaugirard, près Paris, une manufacture où l’on trouve des caniveaux de différentes sortes qui rempliront très bien l’usage que nous indiquons.

Les coulisses faites en gazon (fig. 103) durent 10, 12, 15 ans et quelquefois plus. On donne en général à ces fossés un mètre de profondeur et un demi-mètre de largeur. Lorsque le terrain où on les ouvre est gazonné, on met d’abord à part les gazons que l’on coupe en compartimens égaux et convenables pour être placés renversés au fond du fossé ; ce fond ne doit avoir que de 3 à 6 pouces de largeur. La première terre extraite, comme elle