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Page:Maison rustique du XIXe siècle, éd. Bixio, 1844, I.djvu/333

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L’intérieur des granges construites en maçonnerie doit être soigneusement recrépi et lissé le plus qu’il est possible, afin d’empêcher les rats et les souris de grimper le long des murs, et de gagner ainsi la charpente du comble lorsque les granges sont vides. Alors on les tue aisément avec le fléau, sur le sol même.

La construction des granges, dans les fermes de la grande culture, est très-coûteuse, et leur dépense entre pour une grande portion dans la totalité des frais de ces établissemens.

v. Des aires à battre.

Dans l’état actuel des choses en France, où le battage a lieu presque partout sans machines, l’aire, c’est-à-dire le lieu où l’on bat le blé et autres grains, est une partie essentielle dans la construction des granges. Il doit être en état de résister, soit au trépignement des animaux lorsque le battage a lieu par le dépiquage, comme dans les parties méridionales de l’Europe, et, dans ce cas, les aires sont presque toujours en dehors des habitations ; — soit à la percussion du fléau ; alors l’aire est constamment placée dans la grange et en occupe généralement la travée centrale.

Les aires ordinaires, dans la construction desquelles on fait entrer deux parties de terre franche contre une de bouse de vache, sont déjà d’une bonne consistance. Lorsqu’à ces matériaux on joint du foin ou de la paille hachée très-menue, et encore mieux de la bourre, elles sont encore meilleures. Dans les pays où l’on fabrique de l’huile d’olive, on fait entrer son marc dans la composition de l’aire, et on gagne considérablement de fermeté et de durée. Dans d’autres, on l’enduit, à différentes reprises, de sang de bœuf. Enfin, quelques riches propriétaires les font couvrir de planches d’un pouce au moins d’épaisseur, et bien ajustées ; mais, dans la plupart des fermes, les aires ne sont formées que d’une couche plus ou moins épaisse d’argile ou de charrée (cendres lessivées), ou même de terre végétale battue, couche qui se détruit facilement et dont les débris se mêlent parmi les graines pour en altérer la pureté. — Dans cette opération, ainsi que dans toutes les opérations agricoles, il ne faut pas perdre de vue l’économie ; il faut se contenter des matériaux que produit le pays ; mais on peut toujours en tirer un parti plus avantageux que ne le font la plupart des habitans des campagnes.

Les soins à prendre dans la construction d’une aire consistent à en lier les matériaux de manière qu’ils soient au même degré de consistance dans leur totalité ; à les étendre sur le sol le plus également possible ; à faire en sorte qu’ils ne soient ni trop ni pas assez mouillés ; à la battre à diverses reprises pour la durcir en la tassant de plus en plus ; à boucher les crevasses ou les trous qui s’y forment presque toujours aux approches de sa dessiccation. Une aire bien construite peut durer un grand nombre d’années, si on y fait des réparations de temps en temps. Mais, une fois qu’elle a commencé à se dégrader, elle se détruit rapidement. C’est pendant les chaleurs de l’été qu’il faut les construire et les réparer.

vi. Grange en bois.

La grange en bois, ou gerbier sur poteaux, construite par M. de Morel-Vindé, en 1812, dans son exploitation à la Celle-Saint-Cloud (Seine-et-Oise), nous paraît pouvoir, en quelque sorte, servir de programme pour ces sortes de constructions.

Ce célèbre agronome fait connaître qu’au commencement de 1812, se trouvant inopinément dans la nécessité d’ajouter à ses bâtimens un emplacement suffisant pour serrer la surabondance de ses récoltes ; répugnant à bâtir une grange en maçonnerie, tant à cause de la trop grande dépense qu’entraîne un bâtiment de cette nature, et des dégâts effroyables qu’y occasionent les rats et les souris, que parce que cette bâtisse n’eût pas été finie et sèche pour la récolte alors prochaine ; et ne pouvant d’ailleurs employer, dans cette circonstance, ni son gerbier à toit mobile, ni les meules à la hollandaise, parce qu’il lui fallait, en outre, une aire à battre, il imagina la grange sur poteaux dont il s’agit ici, et dont nous donnons les plans, coupe et élévation (fig. 453, 454 et 455), en observant