Les agriculteurs du comté de Northumberland se sont montrés les plus progressifs sous le rapport de l’emploi des machines à battre. On y a construit une machine à battre mue par une machine à vapeur locomotrice, qui transporte par la force de la vapeur, d’un endroit à l’autre, la machine à battre avec son conducteur. Cet appareil ingénieux est destiné à desservir les petites fermes ; il ne se borne pas à l’égrenage du blé et exécute différents travaux ; il pompe de l’eau, il brise les pierres, etc.
Il n’y a, parmi les agriculteurs de la Grande-Bretagne, qu’une opinion sur la grande utilité des machines à battre et sur la supériorité du système de Meikle sur tous les autres. Ces machines sont en usage général dans toutes les parties du royaume uni, et on les croit tellement indispensables à toute exploitation rurale bien organisée, que, dans les comtés de Perth et de Northumberland, les grands fermiers n’hésitent pas, d’après le témoignage de M. Loudon, à subir les frais d’établissement des machines mues par le vent ou par la force de six chevaux, qui sont les plus dispendieuses, si le propriétaire leur garantit la jouissance pour 21 ans.
Les avantages qui résultent de l’usage de la machine de Meikle sont indiqués par l’auteur du Code of Agriculture : 1o le rendement en grains est supérieur d’un vingtième ; 2o l’opération est extrêmement expéditive ; 3o par cette raison elle prévient beaucoup de prévarications ; 4o le blé endommagé par l’humidité peut être sauvé par ce prompt égrenage, et en le soumettant après à la dessiccation dans un four ; 5o les machines donnent la facilité de se servir, pour la semence, des grains fraîchement récoltés ; 6o l’usage de ces machines facilite le prompt approvisionnement des marchés en cas de disette ; 7o les machines préparent tout aussi bien la paille pour la nourriture des bestiaux ; 8o les machines facilitent le nettoiement des grains, notamment parce que les petites mottes de terre ne sont pas écrasées par le tambour, ce qui arrive quand on se sert des fléaux, et que le tarare ; en séparant la balle du blé, sépare en même temps les petites graines des mauvaises herbes ; 9o l’usage de ces machines affranchit les domestiques de ferme et les ouvriers d’un travail dur et pénible, et il rend le fermier indépendant du bon-vouloir de ses ouvriers et domestiques pour l’un des principaux détails de l’économie rurale ; 10° l’économie du travail résultant de l’usage des machines peut être évaluée, terme moyen, à 1 shelling par quarter de blé (42 cent. par hectol.) — À ces avantages nous ajouterons encore les suivans : 1o de pouvoir employer utilement les domestiques de la ferme et les chevaux dans les journées où ils manquent d’occupation ; 2o de pouvoir profiter des conjonctures commerciales, souvent aussi profitables que passagères.
Le prix d’égrenage exécuté au moyen de la machine écossaise dépend des circonstances locales, trop variées pour qu’on puisse établir un terme précis à cet égard. Le savant auteur de l’Encyclopédie de l’agriculture assure qu’une machine écossaise, de la force de 8 chevaux, accomplit en une journée de 9 heures, y compris le vannage et le nettoyage, l’égrenage de 100 à 300 boisseaux d’Angleterre (72 à 108 hectol.) de froment et d’autres grains en proportion. Un ouvrier intelligent, aidé de deux garçons ou femmes, est nécessaire pour alimenter une machine de cette dimension ; trois ouvriers pour ôter, botteler et ranger la paille dans la grange, et un conducteur de chevaux assisté d’un enfant. Le produit de la journée d’une machine inférieure est évaluée en Angleterre, terme moyen, à 54 hectol. de froment.
Le revient de l’égrenage, y compris le vannage et le nettoyage, est évalué, en supposant l’usage d’une machine de la force de 8 chevaux, mue par un courant d’eau, à 12 c. par hectolitre. Ce revient monte dans la proportion de 2 à 3, si la dimension de la machine ne donne pour résultat que 150 boisseaux par journée. L’usage des forces animales pour moteur élève le revient de 11 ½ sous par hectolitre, l’entretien de 8 chevaux, avec un conducteur et son aide, coûtant, terme moyen, dans ce pays, 35 fr. par journée ; les ouvriers sont comptés dans ce calcul pour 9 schellings (10 francs 18 sous) par journée.
Les prix de premier établissement sont sujets aux mêmes variations ; il est difficile d’établir des principes à ce sujet. La machine de la force de six chevaux est évaluée par M. Low à : 100 liv. st. (2,500 fr.), et, à son avis, chaque ferme de 500 acres (222 ½ hectares) doit être pourvue d’une machine de cette force.
La grande perfection de la machine écossaise, une fois reconnue dans la Grande-Bretagne, ne pouvait rester confinée dans ce pays. La Suède, familiarisée avec l’usage des machines à battre, est le pays qui, le premier, a profité de l’invention de Meikle. Depuis 1802, la machine à battre a été introduite en Pologne ; mais elle s’est répandue depuis 1816, époque du premier établissement d’une fabrique de machines de ce genre, dans une progression si rapide, qu’avant 1830 il y en avait, dans le royaume n’ayant qu’une population de 4,000,000 d’habitans, plusieurs centaines[1].
- ↑ C’est à l’établissement à Varsovie de la fabrique des machines et instrumens d’agriculture sur une très-grande échelle, fondée et dirigée par M. Evans et Ce, et où l’on trouvait une grande quantité de machines à battre écossaises et autres, exécutées d’après les meilleurs modèles et de différentes dimensions, que j’attribue cet heureux résultat. L’entreprise grandiose et bien combinée de M. Evans a rendu un immense service à ce pays, en venant lui donner un actif aiguillon qui n’a pu être égalé nulle part, ni par les sociétés savantes, ni par les exhortations les plus éloquentes des écrivains agronomiques. On se décide facilement à se mettre en possession d’une machine faite et qu’on voit fonctionner ; mais on hésite a commander sa construction, surtout lorsqu’on n’est pas familiarise avec son usage.