Page:Maison rustique du XIXe siècle, éd. Bixio, 1844, I.djvu/410

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
396
liv. ier.
AGRICULTURE : DES CEREALES ET DE LEUR CULTURE SPÉCIALE.

sainis et écobués. Concluons de là qu’il n’est pas difficile sur la nature du sol, et que, comme toute autre plante, il croît plus vigoureusement sur les sols riches, bien fumés, mais aux dépens peut-être de sa fructification. C’est, dit V.Yvart, une des plantes les plus précieuses pour les assolemens des terres sèches, siliceuses, caillouteuses et cretacées.

La croissance du sarrasin est rapide. Il est très-sensible aux influences atmosphériques : la moindre gelée le détruit. On prétend que les éclairs lui causent beaucoup de mal (Duhamel), et que sa fleur coule dans ce cas, ou lorsque les phénomènes électriques se développent dans l’air sans qu’il pleuve (Thaer). Elle ne supporte pas non plus la trop grande ardeur du soleil, ni les vents violens de l’Est. — Le sarrasin ne craint pas une température sèche. Immédiatement après qu’il a été mis en terre, il lève, même par les plus grandes sécheresses ; mais, lorsqu’il se revêt de sa troisième feuille, il demande la pluie pour pouvoir développer les autres ; sa longue floraison se développe quelques semaines après, et alors il doit avoir alternativement de la pluie et du soleil pour que sa croissance s’achève et que ses fleurs nouent ; après sa floraison, il veut derechef un temps sec qui accélère et égalise la maturation de ses fruits, qui arrive après un temps variable entre 2 et 3 mois.

On peut semer le blé noir à toute époque de la belle saison, en prenant garde qu’il ne soit exposé ni aux gelées du printemps, ni a celles de l’automne. Pour plus de sûreté, ou pour avoir un produit continu en fourrage, on sème à 3 ou 4 époques différentes. Si le champ doit être fumé, il convient de répartir le fumier de manière à en répandre la moitié seulement avant l’ensemencement du sarrasin, et le reste après la récolte. Les débris de bruyère lui conviennent particulièrement.

Ordinairement, on ne donne qu’un labour au champ qui doit le recevoir. Cependant Thaer croit qu’il est indispensable de labourer deux fois, afin, surtout, de détruire les mauvaises herbes, et M. De Dombasle va jusqu’à dire que, si 4 ou 5 labours sont nécessaire pour ameublir le sol, on ne doit pas les épargner. A Roville, on exécute 2 labours : l’un en avril, l’autre en mai, et on les fait précéder chacun d’un hersage. Au reste, le nombre des façons préparatoires peut varier, suivant l’usage auquel on destine la plante.

Le mode de sa végétation exige qu’on emploie peu de semence. Il n’en faut guère qu’un demi-hectolitre par hectare, quand on a en vue la production de sa graine, et le double quand on veut le faire servir d’engrais (Vilmorin). La graine demande à être enterrée peu profondément, et par un simple coup de herse ou d’extirpateur.

On choisit pour la récolte le moment où la plus grande partie des graines sont mûres. Il y a deux manières de l’exécuter : l’une consiste à couper les tiges avec la faulx ou avec la faucille ; l’autre, à les arracher. La première est plus expéditive et plus usitée ; la seconde diminue la perte qui résulte de l’égrenage, et permet à un plus grand nombre de graines d’achever leur maturation après le moment de la récolte. On réunit les tiges en bottes qu’on dresse les unes contre les autres, et qu’on laisse plus ou moins longtemps sur place en les disposant en moquettes, comme il a été expliqué au chap. des Récoltes, pour les préserver des déprédations des oiseaux.

On est presque toujours forcé, dit le directeur de Roville, de procéder au battage lorsque les plantes sont a moitié sèches, et alors on ne peut conserver la paille. Un étend le grain en couches très-minces dans les greniers, afin d’en achever la dessiccation. Le sarrasin se bat très-bien au fléau et à la machine.

Le produit qu’il donne est très-variable. Lorsqu’on le sème après une récolte de céréales, dit Thaer, on compte en 7 ans, sur une bonne récolte, trois médiocres et trois mauvaises ; si on le confie à un champ qui est resté en repos ou en pâturage pendant plusieurs années, on s’attend en revanche à une bonne récolte sur deux : 20 à 25 hectolitres de grain par hectare doivent être regardés comme une bonne récolte ; dans les années particulièrement favorisées, le produit peut s’élever au double. Celui du sarrasin, cultivé comme fourrage, est également variable : à terrain égal, Thaer l’a trouvé plus considérable que celui des vesces. Lorsqu’on enterre en vert, on fait agir la charrue à simple ou à double versoir.

J. Yung.

Section vi. — Du Maïs.

Le Maïs (Zen Maïs, Linn.) ; en anglais, Maïze ; en allemand, Mays ; en italien, Gran turco ; en espagnol, Maiz, vulgairement connu en différens lieux sous les noms de blé d’Inde, blé de Turquie, blé d’Espagne, blé de Barbarie ou de Guinée, etc., parait originaire des Deux-Mondes, ainsi qu’il ressort des preuves historiques que j’ai développées ailleurs.

[15 : 6 : 1]

§ ier. — Usages.

Il n’est aucune plante d’un intérêt plus grand et d’une utilité plus générale que le Maïs}. Il croit sous les tropiques, à côté du manioc et de l’igname, et ses épis féconds se retrouvent dans une grande partie des régions tempérées rivaux de ceux du blé. Il sert, sous un grand nombre de formes différentes, à la nourriture des hommes, à celle des animaux domestiques ; — aux besoins de l’économie. Industrielle ; — et il offre des ressources à la médecine hygiénique.

Sous le premier point de vue, on utilise ses grains, tantôt simplement grillés ou bouillis quelque temps avant leur complète maturité ; tantôt réduits en farine et sous forme de pâte, d’une digestion facile, à laquelle on a donné, selon sa consistance, le choix des assaisonnements et le mode de préparation, les noms de polenta, de gaude ou de millias ; — d’autres fois, sous forme de pain ou de gâteaux, avec ou sans mélange de farine de froment, de seigle, de sarrasin, de fécule ou de pulpe de pommes-de-terre. Soumis a la fermentation alcoolique, le maïs peut remplacer l’orge ou le blé dans la