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liv. ier.
Agriculture : sol

nent aux productions des terres légères. — Les céréales peuvent même y acquérir une bonne qualité. — Les sainfoins, les luzernes, les trèfles, les raves, etc., y réussissent. — Les arbres seuls, ceux surtout qui ont une disposition à pivoter, s’en accommodent fort mal, ce qui est facile à concevoir. La vigne, et, parmi ses nombreuses espèces, celles qui produisent des vins blancs, y donnent particulièrement de très-bons produits sur les hauteurs convenablement exposées.

Les personnes qui ont parcouru les coteaux du Cher, de la Creuse, de l’Indre, une partie d’Indre-et-Loire et de la Vienne depuis Châtelleraut jusqu’à l’embouchure de cette rivière dans la Loire, et qui ont surtout visité avec attention les rives de ce fleuve entre Tours et Saumur, ont pu remarquer avec l’auteur d’un ancien Mémoire inséré dans le tome 3 des Mémoires de la Société d’agriculture de la Seine, que, tantôt les bancs de tuf sont recouverts d’une poussière calcaire, qui communique sa couleur blanchâtre au sol entier, et tantôt, lorsqu’ils se trouvent à une plus grande profondeur, d’un terrain jaunâtre ou rougeâtre dans lequel la quantité du calcaire diminue en proportion de l’augmentation de celle d’argile. Au moyen de cette seule indication, on peut distinguer très-aisément dans ces cantons les terres à vins blancs, des terres à vins rouges.

Quand les sols de tuf sont peu profonds, leur amélioration est d’autant plus lente et plus difficile que le sous-sol jouit plus efficacement de la propriété absorbante dont j’ai déjà parlé, et qu’on ne peut le ramener à la surface, même en petite quantité, sans compromettre plus ou moins long-temps la fécondité de la couche labourable. — En pareil cas cependant, au risque de diminuer encore momentanément les produits, dans l’espérance fondée de les accroître pour l’avenir, on fera bien d’entamer légèrement le tuf inférieur chaque année, lors du premier labour, jusqu’à ce qu’on soit parvenu à une profondeur suffisante.

IV. Terres marneuses. — Les marnes (qui devront être considérées dans un autre chapitre comme amendemens) se trouvent quelquefois à la superficie du terrain, et forment alors des sols calcaires à divers degrés qui sont assez communs pour nous occuper utilement ici.

Les marnes argileuses sont de couleur blanchâtre, grisâtre ou jaunâtre ; elles se délaient à la moindre pluie, se dessèchent et se durcissent par l’effet de la sécheresse la moins prolongée. — Dans ce dernier état elles ne sont pas friables comme la craie. Mais elles se rapprochent des argiles en ce qu’elles retiennent souvent l’eau des pluies, ce qui les rend d’autant plus froides que leur couleur empêche qu’elles ne soient pénétrées par la chaleur solaire. — Elles déchaussent presque aussi facilement que les craies, et, comme ces dernières, elles manquent généralement d’humus.

En des circonstances particulières, lorsqu’elles contiennent peu d’argile, qu’elles présentent une surface inclinée, et qu’elles peuvent être humectées à une certaine profondeur, par suite de leur gonflement et du peu d’adhérence de leurs parties, entraînées par leur propre poids, elles se laissent aller sur elles-mêmes, et glissent parfois à des distances considérables.

Les sols marneux sont peu fertiles. Lorsque l’argile domine dans leur composition, ils rentrent dans la classe des terres glaiseuses ou argilo-calcaires ; — quand c’est la chaux carbonatée, ils se rapprochent plus ou moins de la craie.

§ IV. — Des sols magnésiens.

La magnésie combinée au gaz acide carbonique se montre çà et là dans les terres arables, unie, dans la plupart des cas, à la chaux carbonatée. Quand elle est saturée de ce gaz, elle n’exerce sur la végétation aucune action défavorable, ainsi qu’on peut en acquérir la preuve plutôt en Angleterre et en Allemagne qu’en France. Loudon rapporte qu’elle existe en proportion très-notable dans le Lizard, l’une des parties les plus fertiles du Cornwal. — Il serait facile de citer des exemples analogues sur plusieurs autres comtés, tels que le Leicestershire, le Derbishire, l’Yorkshire, etc., etc, dans lesquels on trouve d’abondans calcaires magnésiens.

Mais, lorsqu’elle a été artificiellement dépouillée de son acide carbonique par la calcination, ou lorsqu’elle a été simplement ramenée à l’état de sous-carbonate (et elle existe parfois ainsi dans la nature), elle exerce une influence des plus fâcheuses, que Davy attribue à son affinité moins grande que la chaux pour le gaz précité. — Elle devient alors un véritable poison pour une foule de végétaux. — Je me vois de nouveau forcé, afin d’éviter des répétitions, de renvoyer le lecteur au chapitre des amendemens pour de plus amples détails.

Les cultivateurs anglais ont constaté, par plusieurs faits, ainsi que l’indiquait la théorie, que le meilleur moyen de neutraliser l’action de la magnésie, c’était d’une part de la mettre en contact dans le sol avec des tourbes ou des engrais qui pussent lui procurer une quantité suffisante de gaz acide carbonique, et de l’autre, d’éviter complètement l’emploi de la chaux sur les terres dans lesquelles elle surabonde.

§ V. — Des sols tourbeux et marécageux.

Lorsque les végétaux se décomposent à la surface du globe sous l’influence de l’oxigène de l’air, ils donnent naissance à du terreau. Quand ils fermentent et s’altèrent dans l’eau, ils forment la tourbe qui s’en distingue par des propriétés chimiques fort différentes. — Tandis que l’un est d’une fertilité, on peut dire excessive, la seconde est complètement impropre à la végétation de toutes plantes autres que celles que la nature a fixées par exception sur les tourbières. Ce dernier fait, qu’on le regarde comme la suite d’une fermentation acide particulière, de la transformation du mucilage en une substance huileuse que les tourbes paraissent contenir en quantité plus considérable que les terreaux, de l’action probable, dans quelques cas seulement, des pyrites, ou de toute autre cause, ce