Page:Maison rustique du XIXe siècle, éd. Bixio, 1844, I.djvu/534

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ou pour augmenter le lait des vaches, ou pour la nourriture des autres bestiaux. M. de Villeneuve ajoute souvent aux pommes-de-terre dont ses bœufs mangent, dans la saison, de 130 à 140 livres par paire, de la farine d’ers, pétrie avec un peu d’eau et de sel. Il affirme, avec beaucoup d’autres, que cette même farine est très-dangereuse pour les cochons. — Quant aux fanes, elles sont tellement nourrissantes et échauffantes, qu’il faut en modérer l’usage, et ne les donner aux animaux de travail que pour augmenter leur énergie.

On sème cette plante en automne ou au printemps, à raison de 60 kilog. environ a l’hectare. Elle a la précieuse propriété de résister aux sécheresses, et de prospérer dans les terrains calcaires fort médiocres.

Lentille (Ervum lens). Voy. page 423 et suivantes.

Sainfoin (Hedisarum). Calice persistant, à 5 divisions subulées ; carène aplatie ; gousses plus ou moins comprimées, de forme irrégulièrement arrondie et à une seule graine.

Le Sainfoin commun (Hedisarum onobrychis, Lin.), Crête-de-coq, Esparcette, Sainfoin de Bourgogne, etc. (fig. 698), a une tige droite, rameuse, Fig. 698. de 1 à 2 pi. d’élévation ; des feuilles ailées avec impaire, ordinairement à 17 ou 19 folioles ; des stipules minces, sèches et demi-transparentes ; des fleurs en épi terminal, de couleur rose, à ailes très-courtes et à divisions du calice aussi longues que la corolle ; des légumes raboteux, garnis de pointes piquantes qui leur donnent l’aspect de crêtes.

Le sainfoin est un des fourrages les plus précieux, non seulement parce qu’il est excellent en lui-même, mais parce qu’il croit dans les terrains très-médiocres de nature sableuse ou calcaire, et qu’il les améliore sensiblement. C’est surtout dans le midi que la faculté de résister aux sécheresses le rend d’une haute importance, bien que dans beaucoup de lieux on ait déjà trouvé de l’inconvénient à le ramener trop souvent aux mêmes places.

Les renseignemens suivans ont été transmis à la direction de la Maison rustique du 19e siècle, par M. le baron d’Hombres Firmas.

« L’esparcet qu’Olivier de Serres appelle une herbe fort valeureuse, est cultivé très en grand dans quelques communes du département du Gard, et depuis longtemps justement apprécié des paysans, qui lui attribuent leur bien-être. Les plus âgés se rappellent et conviennent tous qu’avant son introduction, leurs troupeaux étaient beaucoup moins considérables ; qu’ils ne tenaient pas la moitié des bêtes de labour qu’ils emploient aujourd’hui ; qu’ils avaient moins de terres en rapport, et que, faute de travail ou d’engrais, elles ne rendaient pas d’aussi bonnes récoltes.

« Les frais de culture du sainfoin ne sont pas considérables, la graine est peu chère, et l’on ne fume pas la terre, à moins qu’on n’ait des engrais de reste, qui, dans ce cas cependant, ne sont pas perdus. On fait un premier labour en novembre ou décembre, un mois après on en fait un second, et l’on sème au commencement d’avril ; les labours sont faits avec l’araire du pays, attelée de deux bœufs ou deux mules. On sème à la main, en employant à peu près deux fois autant de semence que si c’était du blé, parce que le fourrage épais est plus délicat, ses tiges étant moins fortes. Ensuite on passe sur la terre la herse, pour recouvrir la semence, ou, faute de cet instrument, on emploie pour briser les mottes et unir la terre, une claie de parc ou une planche sur laquelle monte le conducteur du cheval qui la traîne. Si l’on fait épierrer ou du moins ôter les plus grosses pierres, les plus saillantes, ce ne sera que mieux, et l’on pourra faucher de plus près.

« Lorsqu’il y a des arbres isolés au milieu d’une terre, on a grand soin de laisser un intervalle, sans semer autour de leur pied ; nous avons vu périr des noyers et des gros chênes sans autre cause apparente ; aussi, dans tous les baux à ferme de ce pays, on prescrit de laisser un rond de deux pas de rayon au tour des arbres, et la même distance entre les allées de mûrier qui bordent ou divisent les terres.

« Quelquefois on sème le sainfoin avec de la paumelle (orge n°6) ou de l’avoine ; on avance alors d’un mois l’époque des semences, et l’on obtient une récolte la même année. Mais c’est moins avantageux qu’on ne croit, la paumelle et la prairie artificielle en souffrent l’une et l’autre : elles réussiront toujours mieux si on les sépare.

«  On dit qu’en Provence on sème le sainfoin en automne. Nos hivers sont peu rigoureux ; cependant quelques essais nous persuadent que des petites gelées et des dégels alternatifs sont très-contraires à cette plante lorsqu’elle est jeune, quoiqu’un froid plus rigoureux ne lui porte pas atteinte quand elle a pris de la force.

« C’est vers le milieu de mai, pendant la floraison de l’esparcet, qu’on le fauche, quand on le destine à la nourriture des animaux. On le coupe plus tard, comme je le dirai tout-à l’heure, lorsqu’on veut recueillir sa graine ; la première année cette récolte est peu considérable, mais la seconde il est déjà en bon rapport, et dans les bonnes terres il acquiert 7 décimètres de hauteur. Un champ de 2 hectares produit 20 charretées de 10 quintaux métriques de fourrage sec.

«  Lorsque la température est favorable à la végétation, on fait une seconde coupe au commencement d’août, qui rend à peu près un quart de la première en regain tendre, qu’on garde pour les agneaux. Je parle des