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chap. 3e.
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DOSES, EFFETS DES CHAULAGES.


tandis que celle-ci est plus favorable au fourrage, à la croissance de la paille, aux légumineuses ; elle ménage davantage le sol, mais demande une dose plus forte.

La chaux magnésifère agit d’une manière très-active, mais épuise le sol si on la donne en grande dose ou si on ne la fait pas suivre d’engrais abondans ; elle a épuisé quelques cantons d’Angleterre, des provinces entières d’Amérique, et c’est à elle que sont dus la plupart des reproches qu’on fait à la chaux.

On peut, à l’aide de procédés chimiques fort simples, s’assurer de la nature de la chaux qu’on emploie. (Voyez la sect. qui traite de l’analyse des sols, à la fin du chap. précédent.)

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§ vi. — Des seconds chaulages.

Lorsque le champ chaulé revient à l’état où il était avant l’opération, que les mêmes végétaux inutiles y reparaissent, que les récoltes baissent dans leurs produits, il est temps de revenir à la chaux. L’époque d’un second chaulage dépend de la dose du premier ; lorsque la dose a été petite, il faut, comme les Flamands et les Manceaux, la recommencer en entier ; lorsqu’elle a été forte, on peut la réduire de moitié. On doit d’ailleurs, dans cette circonstance, prendre conseil de l’état du sol et de l’expérience, parce qu’il est des terrains qui demandent et consomment de plus fortes doses que d’autres.

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§ vii. — Doses des chaulages.

Les doses des premiers, comme des seconds chaulages, varient avec la consistance des sols ; elles doivent être faibles dans les sols légers et sablonneux, elles peuvent sans inconvénient être fortes dans les terrains argileux. La dose doit aussi varier suivant que le sol est plus ou moins bien égoutté ; les faibles doses, dans un sol où les eaux ne s’écoulent pas facilement, sont peu sensibles ; mais, si la dose est forte et les labours profonds, la chaux facilite l’écoulement et l’assainissement de la terre. On conçoit que la dose doit aussi s’accroître avec la quantité annuelle de pluies qui tombe dans un pays, parce qu’à mesure que cette quantité s’accroît, les conditions de l’écoulement du sol deviennent plus difficiles.

Toutefois, les procédés des départemens du Nord et de la Sarthe semblent nous avoir indiqué la dose moyenne de chaux qui convient en général au sol. Ainsi, le chaulage foncier du Nord, qui tous les dix ou douze ans donne au sol 40 hectol. de chaux par hect., un peu plus de 3 hectol. par an, concorde avec celui de la Sarthe qui en donne 8 à 10 hectolitres tous les trois ans ; le 1er donne en une fois ce que l’autre distribue petit-à-petit. Comme tous deux sont une moyenne, on pourrait en induire que la terre demande par an 3 hectol. de chaux par hect., pour soutenir sa fécondité. Cependant, comme ni le sol ni les plantes ne consomment cette chaux, il est à croire qu’au bout d’un temps plus ou moins long le sol en aura reçu assez pour n’en avoir plus besoin pendant un certain espace de temps.

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§ viii. — Conduite à tenir dans les sols chaulés.

Après avoir doté son sol d’une grande fécondité, l’avoir mis dans le cas de produire les récoltes les plus précieuses, qui sont souvent les plus épuisantes, il faut le ménager, lui donner des engrais en compensation des produits obtenus, employer en litière et non en nourriture les pailles accrues de moitié, faire produire des fourrages à un sol qui désormais les porte avec avantage, modifier enfin l’ensemble et les détails de sa culture d’après les forces nouvelles de son sol, les prix de commerce et les convenances locales.

Toutefois, il ne faut pas se presser de changer d’assolement : une pareille opération est longue, difficile, très-dispendieuse, et ne doit être faite qu’avec une grande maturité.

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§ ix. — Effets de la chaux sur le sol.

Les effets de la chaux, quoique analogues, ne sont point identiques avec ceux produits par la marne, et les qualités des sols chaulés diffèrent en quelques points de celles des sols calcaires : le blé d’un fonds chaulé est plus rond, plus fin, donne moins de son et plus de farine que celui d’un sol non chaulé, d’un sol calcaire ou d’un sol marné ; le grain du sol marné est plus gris, donne plus de son et ressemble au blé sur trèfle, quoiqu’il lui soit préférable : le blé du sol chaulé a plus d’analogie avec celui produit par les terres amendées avec les cendres lessivées. Le sol chaulé craint moins la sécheresse pour sa semaille que le sol calcaire ou le sol marné ; il n’est pas sujet à laisser verser, dans le printemps, sa récolte au moment de sa floraison, lorsque la semaille a été faite dans une terre sèche.

Dans le sol chaulé, les mauvaises herbes et les insectes disparaissent ; la terre prend de la consistance lorsqu’elle est trop légère, et s’adoucit lorsqu’elle est trop argileuse. La surface du sol argilo-siliceux, auparavant unie et blanchâtre, s’ameublit, et devient rousse et comme cariée, elle sèche, durcit et se fend par la chaleur, et fuse et se délite par la pluie qui succède ; cet ameublissement spontané facilite beaucoup la main-d’œuvre du cultivateur, le travail et la marche des racines dans le sol, et l’action réciproque de l’atmosphère sur le sol qui reste ouvert à ses influences.

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§ x. — Quantité de chaux absorbée par la végétation.

Les végétaux des sols calcaires ou devenus tels par amendement, renferment dans leurs cendres 30 pour cent de carbonate ou de phosphate de chaux qui sont perdus pour le sol ; mais le produit du sol chaulé, de qualité moyenne, est à peu près, pendant les 2 années de l’assolement, de 20 milliers pesans de produits secs par hectare, qui contiennent un peu moins d’un hectolitre de chaux ; la végétation en a donc employé un demi-hectolitre par an. Nous avons vu qu’il en fallait en moyenne, par an, 3 hectol. par hectare, la végétation n’absorbe donc en nature qu’un 6e de la chaux qu’on donne avec profit au sol ;

AGRICULTURE
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