Page:Maison rustique du XIXe siècle, éd. Bixio, 1844, II.djvu/567

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CHAPITRE XX. — DES OISEAUX DE BASSE-COUR.

L’éducation des oiseaux de basse-cour est une industrie lucrative et qui demande peu de frais, quand on sait proportionner le nombre et l’espèce des volatiles qu’on élève, à l’étendue de l’exploitation, à la nature du sol et des produits qu’on récolte, et surtout à la facilité qu’on a de s’en défaire avantageusement. On divise les oiseaux de basse-cour en gallinacées, oiseaux dont le bec est ordinairement pointu et les doigts du pied libres  : poule, dindon, paon  ; et en oiseaux aquatiques, à bec large et plat et à doigts réunis par des membranes  : canard, oie, etc.

SECTION Ire. — De la basse-cour.

Dans presque toutes les fermes on laisse aux volailles la liberté de vaguer dans les cours au milieu des bestiaux, afin qu’elles puissent recueillir dans les fumiers et les litières les grains échappés des mangeoires ou rendus dans les excréments sans avoir été altérés par la digestion, ce qui procure le double avantage de les nourrir pour ainsi dire sans frais et de débarrasser les fumiers d’une foule de grains qui plus tard germeraient dans les terres, au grand détriment de la culture. Aux yeux de la plupart des cultivateurs, c’est même là le plus grand avantage qui résulte de l’éducation des volailles. Mais lorsque l’on attache à la volaille une grande importance, soit par le plaisir qu’on éprouve à l’élever, soit par la facilite qu’on a de la vendre à haut prix, on construit pour son habitation un local particulier qu’on appelle basse-cour. La basse-cour doit être séparée des autres bâtimens de la ferme au moyen d’un mur, d’un treillage ou d’une haie très-épaisse, afin que la volaille ne soit pas troublée par les autres animaux domestiques. On y plante des arbres, des mûriers, ou des sureaux par exemple, qui, tout en donnant de l’ombrage, fournissent une nourriture saine, et en été un refuge pour la nuit aux poules et aux dindons qui aiment mieux s’y jucher que de rentrer dans leur poulailler. La basse-cour doit présenter  : 1° Un amas de sable ou de cendres, parce qu’en été surtout les poules aiment à s’y rouler pour se débarrasser de la vermine qui les ronge  ; 2° Un carré de gazon pour qu’elles puissent y paitre et prendre leurs ébats  ; 3° Au niveau du sol, des baquets couverts dans lesquels, en passant leur tête par des ouvertures pratiquées exprès, elles peuvent s’abreuver d’une eau pure qu’on a soin de renouveler chaque jour en hiver et deux fois par jour en été  ; 4° Une ou deux mares pour les oiseaux aquatiques, à moins qu’il n’existe dans le voisinage de la ferme un ruisseau ou un étang où l’on devra les laisser vaguer tout le jour au gré de leur caprice, en ayant soin seulement de les appeler vers la maison pour la distribution de leur nourriture  ; la volaille remarque bientôt l’heure de ces distributions, et ce moment venu, accourt d’elle-même au logis. 5° Enfin un poulailler.

§ Ier. — Du poulailler.

Dans l’éducation des oiseaux de basse-cour, il faut autant que possible seconder leur instinct  ; ainsi, comme il est reconnu qu’un instinct naturel porte les poules à se serrer au poulailler l’une contre l’autre, les dindons à percher en plein air sur des arbres, les canards et les oies à se nicher sous des toits pratiqués dans des lieux bas et humides, les pigeons à occuper le faite des bâtimens les plus élevés, il faut tenir compte de tous ces indices dans la disposition d’une basse-cour. Le renouvellement de l’air dans leur demeure est de première nécessité  ; car tout le monde a remarqué que, lorsqu’ils ont passé la nuit dans des endroits resserrés et malpropres, dès qu’on leur en ouvre la porte, ils se précipitent au dehors avec une vivacité qu’on ne peut expliquer que par le malaise qu’ils éprouvent. Il faut donc les soustraire à l’influence de leur propre infection, en donnant de l’espace à leur logement, en le blanchissant à la chaux, en y brûlant quelquefois une botte de paille, en le nettoyant à fond de temps en temps, et en renouvelant fréquemment leur litière. Lorsque, malgré toutes ces précautions, le poulailler est devenu trop infect et trop malsain, il faut le désinfecter, comme les bergeries, au moyen du chlorure de chaux. La propreté influe beaucoup sur la santé des oiseaux, et par suite sur la qualité de leur chair qui devient plus ferme et plus savoureuse ; mais il ne faut pas se contenter de purifier leur demeure, il faut encore que leurs nids, leurs juchoirs et leurs auges soient nettoyés et quelquefois même lavés à l’eau chaude  ; il faut aussi renouveler souvent le foin et la paille dont ils sont garnis, sans quoi la fiente ne tarde pas à engendrer une vermine qui attaque les petits et incommode la mère au point de lui faire abandonner sa couvée. Le poulailler doit être construit dans un endroit sec et exposé à l’est ou au sud-est, de manière à recevoir les rayons du soleil aussitôt qu’il paraît sur l’horizon. Il faut qu’il ne soit ni trop froid l’hiver, ni trop chaud l’été, que les poules puissent s’y plaire et ne soient pas tentées d’aller coucher et pondre à l’aventure. Quoique le plus souvent toutes les espèces de volailles soient logées ensemble, il est préférable qu’elles soient isolées par des séparations et qu’elles aient des entrées particulières, afin que chaque espèce puisse recevoir les soins spéciaux qui lui conviennent. Le poulailler doit être subdivisé en plusieurs logemens destinés spécialement aux poulets, aux dindons, aux canards, aux oies, et en outre aux nouvelles couvées, aux volailles à l’engrais et aux volailles malades. Quand l’emplacement est petit, les pièces destinées aux différentes espèces peuvent être placées les unes au-dessus des autres  ; dans ce cas les canards et les oies doivent occuper les cases inférieures. Dans chaque pièce, des ouvertures fermées de volets sont disposées l’une vis-à-vis de l’autre, de manière à ce qu’en été il s’établisse un courant d’air qui assainit et rafraîchit le poulailler, et qu’en hiver il suffise de tenir les volets fermés, pour y maintenir une température douce. Ces fenêtres se composent d’un grillage très-serré pour interdire l’accès du poulailler aux ennemis des volailles. La porte doit présenter à son milieu une petite ouverture par laquelle les poules puis-sent entrer du dehors à l’aide d’une échelle, et se placer sur le juchoir qui se trouve toujours au niveau de cette ouverture. La grandeur du poulailler doit dépendre de la quantité de volailles qu’on veut entretenir. Chaque poule a besoin d’un emplacement de 1 pied 1/2 carré. Le mobilier d’un poulailler consiste  : 1° dans l’échelle extérieure dont nous avons parlé  ; 2° dans le juchoir  : c’est une large échelle de bois appuyée d’un côté à la partie supérieure du mur du poulailler, et de l’autre reposant sur le sol avec une inclinaison telle que les poules juchées dans le haut ne salissent pas celles qui sont placées au dessous  ; les échelons inférieurs doivent être placés assez près du sol pour en faciliter l’accès aux poulets qui n’ont pas encore la force de s’y jucher en volant  ; 3° dans les nids dont on facilite l’accès aux poules par de petites échelles qui leur permettent d’y arriver sans efforts et sans qu’elles courent le risque de casser leurs œufs.

§ II. — De la fille de basse-cour.

Dans les grandes fermes, si l’on veut tirer de l’éducation des volailles tout le profit possible, il faut leur donner un surveillant spécial. C’est une femme qu’on charge ordinairement de ce soin  : il faut qu’elle soit douce, patiente, adroite et vigilante, qu’elle se fasse connaître et aimer de ses volailles, en venant souvent au milieu d’elles, en les caressant, en leur donnant à manger dans le