Page:Maison rustique du XIXe siècle, éd. Bixio, 1844, III.djvu/114

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de la laine, non pas de les relever per- pendiculairement, ce qui enlèverait en même temps des flocons de celle-ci et les projetterait au loin, mais de retirer les bras en arrière pour dégager du tas de laine la baguette avant de la relever. On pourrait se servir pour ce battage des machines appelées loups dont on fait usage dans les fabriques de draperies ; la laine en serait mieux ouverte et plus pure. Quelque soit le mode de lavage qu’on adopte pour les laines, il faut, autant que possible, faire choix d’une eau pure, claire et courante. Une eau dormante qui est propre peut aussi très bien servir à cet usage. Les eaux qui cuisent bien les légumes, qui dis- solvent facilement le savon, doivent obtenir la préférence. On doit éviter l’emploi des eaux dures, crues, calcaires, séléniteuses, non seulement parce que les sels calcaires qu’elles contiennent décompo- sent le suint, qui est un savon animal, mais parce que les nouveaux sels insolubles qui résultent de cette décomposition se précipitent et se fixent sur la laine, l’incrustent, altèrent son éclat, la rendent, quoique fine et douce, rude au toucher ou cassante, et nuisent sensiblement à ses bonnes qualités. On remédie en partie à la dureté et à la crudité des eaux en les exposant pendant 8 ou 10 jours à l’avance au soleil et à l’air, en y jettant de l’urine humaine putréfiée ou bien des cendres de bois. Dans les eaux séléniteuses, c’est-à-dire qui con- tiennent du plâtre ou gypse en dissolution, une très petite quantité de carbonate de soude suffit pour faire disparaître leur dureté. De même, en ajoutant un peu d’ammoniaque à celles qui sont crayeuses, on parvient à les rendre douces. § iii. — Des divers modes de lavage des laines. Il y a deux modes distincts de lavages, celui qui se fait à l’eau froide et celui qu’on exécute à l’eau chaude. 1° Lavages à froid. Le lavage à froid peut se faire sur le dos des mou- tons, c’est ce qu’on nomme lavage à dos ou sur pied, ou bien avoir lieu après que leurs toisons ont été enlevées, classées, triées, épluchées et battues. Ce lavage, ainsi que nous l’avons dit en parlant du suint, est souvent suffisant pour les laines communes qu’il purifie complètement quand il est exécuté avec soin ; mais, pour les laines fines de mérinos, il n’en- lève la plupart du temps que le suint proprement dit, et laisse, au moins en très grande partie, la mat- ière grasse dont il faut ensuite se débarrasser en fabrique par l’opération que nous avons nommée dégraissage. A. Lavage à dos. Nous ne discuterons pas ici les avantages ou les inconvénients du lavage à dos, dont nous traitons autre part dans cet ouvrage, nous voulons faire con- naître seulement les méthodes qui devraient être employées quand on adopte ce mode de lavage. Pour opérer le lavage à dos, on fait entrer chaque mouton, dit dauBenTon, dans une eau courante jusqu’à ce qu’il en ait au moins à mi-corps ; le berger est aussi dans l’eau jusqu’aux genoux ; il passe la main sur la laine et la presse à différentes fois pour la bien nettoyer. Dans les cantons où l’on n’a pas Fig. 101. d’eau courante, ou quand on ne posséde qu’un petit nombre de bêtes, on peut les laver dans des baquets ou auges dans lesquelles ils plongent, ou en versant l’eau avec un pot sur la laine des moutons en même temps qu’on la presse avec la main. Dans tous les lieux où l’on a dans le voisinage soit une mare, un étang ou une rivière, on doit préférer d’y plonger presqu’en entier les animaux, en les y frottant et nettoyant avec soin. Quand on est à portée d’une chute ou d’un moulin à eau, on peut placer successivement les moutons sous la vanne de décharge ; la rapidité du courant suffit seule pour nettoyer leurs toisons. Pour exécuter en Écosse le lavage à dos ( fig. 101), on fait choix d’un ruisseau assez profond pour qu’un homme ait de l’eau environ jusqu’à moitié des cuisses. Trois laveurs au moins et cinq au plus sont placés à peu de distance les uns des autres dans l’eau, le 1er à la partie inférieure du courant ou aval, et le dernier à la partie supérieure ou amont. Ainsi disposés, on passe un mouton au 1er laveur qui de la main gauche le saisit par la cuisse gauche, le retourne aussitôt, la main droite le ten-

CHAP.5e LAVAGE À FROID DES LAINES 101 ant par la nuque. Alors ce laveur agite à plusieurs reprises l’animal dans l’eau, en le tournant, tantôt d’un côté, tantôt de l’autre, et en lui imprimant en même temps et successivement un mouvement doux en avant et en arrière. Pendant ce mouvement composé, la laine battue par l’eau s’ouvre, se net- toie et se rabat, tantôt d’un côté, tantôt de l’autre. Après un certain temps ce laveur passe l’animal au 2e laveur qui est au-dessus de lui et celui-ci, après avoir répété la même opération, le transmet au 3e, et ainsi de suite jusqu’au dernier qui, a près avoir examiné la peau et l’état de propreté de la laine, s’il les juge suffisamment nets, plonge le mouton dans l’eau jusque par-dessus la tête, le retourne et l’aide à gagner le rivage.