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chap. 8e.
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CULTURE DES ABEILLES.


ruche qu’on veut emporter. On passe dessous le fumeron qu’on secoue pour produire plus de fumée afin d’en chasser les abeilles qui y restent. Ensuite on enlève cette moitié pour la remplacer par une moitié vide dont on s’est muni. On la rapproche d’abord par le derrière en poussant sur les joints de la fumée pour écarter les abeilles et ne pas en écraser. On apporte la moitié pleine auprès de la ruche faible à laquelle on l’adapte par le même procédé. Ensuite on revient à la ruche forte à laquelle on retire promptement la moitié vide pour la remplacer par celle de la ruche faible. On fournit facilement du miel aux ruches villageoises et aux ruches à hausses en échangeant leur couvercle ou hausse supérieure, s’ils sont vides, contre un couvercle ou une hausse qui contient du miel et qu’on a conservé à cet effet.

Bientôt le froid augmente d’intensité et annonce la gelée, la neige et le givre. Alors il est utile de tourner l’entrée des ruches au nord-est pour empêcher les abeilles de sortir, ou de les transporter dans un lieu obscur et sec qui ait une ouverture du côté des vents secs. C’est le temps de surveiller les souris, les rats, les pic-verts, les mésanges, surtout lorsque les ruches sont de paille ou d’osier, parce que les abeilles engourdies sont sans défense.

La méthode employée ci-dessus pour travailler sans danger une ruche et qu’on nomme état de bruissement, est toujours celle qu’il faut suivre quand on veut se rendre maître des abeilles.

[8.2.3.5]

§ V. — Opérations au commencement du printemps.

Dès que la saison se radoucit, que les saules, marsaults, coudriers fleurissent, et que les abeilles ranimées commencent leurs mouvemens, on visite de nouveau les ruches pour nettoyer les plateaux et y répandre un peu de sel, couper 2 ou 3 pouces du bas des rayons, pour peu qu’il y ait de la moisissure, enfumer les ruches pour en renouveler l’air, et enfin couper 1 ou 2 rayons des côtés s’ils sont vides, et qu’on y soupçonne des œufs ou larves de fausse teigne. Ensuite on remet chaque ruche dans sa position ordinaire après s’être assuré de son approvisionnement.

Aux premiers beaux jours, on place devant les ruches des assiettes remplies d’un sirop tiède qui contient un peu de liqueur fermentée, comme du vin, etc., pour les préserver, conjointement avec le sel, de la diarrhée qui peut les attaquer dans cette saison, surtout si le temps ou la température du canton est humide. C’est principalement dans ces cantons que la fausse teigne multiplie le plus et que l’abeille est moins active. On place en conséquence 2 ruches vides sur le plateau desquelles on met des débris de vieux rayons de cire pour attirer et détruire ces parasites. C’est aussi le meilleur moment pour faire la chasse aux guêpes et frelons avec des filets dits échiquiers.

La saison est-elle favorable aux abeilles, on les visite 1 ou 2 fois par semaine pour s’assurer à la simple vue s’il y a de l’activité dans les travaux. Seulement, dans les cantons où les fausses teignes sont communes, on soulève les surtouts pour tuer celles qui s’y cachent pendant le jour ; et si on aperçoit des ruches dont les abeilles font peu de mouvemens, on les lève un peu par-derrière pour vérifier s’il n’y a pas des crottes de fausses teignes sur le plateau, ou de leurs fils entrecroisés entre les rayons. Dans ce cas, après avoir mis les abeilles en état de bruissement, on enlève les rayons des côtés ou partie de ces rayons qui sont attaqués par ces insectes ; on nettoie le plateau et on remet la ruche en place. Si les dégâts étaient considérables, il vaudrait mieux transvaser les abeilles et leur donner le soir du miel pour commencer des rayons dans leur nouvelle ruche. On nettoie tout de suite l’ancienne, et on y passe le feu, et après avoir extrait le miel, on fait tout de suite fondre les rayons pour détruire les œufs et les vers des fausses teignes, ainsi que les rayons mis dans des ruches vides pour attirer cette vermine, ruches qu’on visite en même temps que les autres. S’il y avait du couvain on le rendrait aux abeilles, soit en le suspendant, soit en posant les rayons verticalement sur deux petites fourches de bois fendues dans le haut ou de fil de fer dont l’extrémité inférieure est enfoncée dans un morceau de planche de 4 à 5 pouces de long sur 2½ pouces de large pour y poser au besoin 2 morceaux de rayons. Le tout préparé est placé sur le plateau dans la direction des rayons.

Mais s’il survient dans cette saison des pluies qui durent plus de 8 jours, qui empêchent les abeilles de sortir, ou des vents secs qui enlèvent le nectar à mesure de sa production, et forcent les ouvrières, qui ne trouvent que du pollen à consommer le miel en provision, il faut redoubler de vigilance, s’assurer s’il reste du miel dans les ruches, ou si les ouvrières en manquent, ne pas leur épargner le sirop ou le miel, car la consommation en est considérable à cette époque pour le couvain. Si on négligeait de le faire, on serait exposé à perdre une partie de ses essaims, les uns parce que la famine les détruirait, les autres parce que le couvain qui aurait péri entrerait en putréfaction et occasionnerait non seulement la mort des ouvrières de la ruche, mais pourrait encore entraîner la destruction du rucher en y développant une maladie épidémique. Il ne sortirait pas des ruches des essaims précoces qui sont la richesse de l’apiculteur, et on trouverait dans beaucoup d’alvéoles des ruches conservées du pollen découvert qui durcit, dont les abeilles ne peuvent faire usage, et qui par son poids trompe sur la quantité de miel contenu dans les ruches. Le sirop et le miel qu’on leur donne jusqu’au retour de la saison favorable ne sont qu’une avance que les abeilles rendront plus tard avec un grand bénéfice. Dès que le temps change, on enlève les ruches mortes, on tire des ruches conservées le couvain qui a péri, et on en extrait, s’il est possible, la cire. Dans le cas contraire, on enterre le tout pour empêcher les ouvrières d’en approcher.

Les amateurs des ruches villageoises dont les corps ont 3 ans, profitent du moment de la grande abondance du nectar pour les renouveler. À cet effet ils tirent le couvercle et le remplacent par une planchette ; ils soulè-