lées de leurs produits. Les premiers, recevant un excédant de superficie, prendront nécessairement une part moindre dans le fonds. Cette compensation, entre une valeur foncière et une valeur de même nature que l’argent, constituera une vente sous l’apparence d’un partage ; vente qui, pour être valable, exigera l’assentiment formel des intéressés, et par conséquent une pleine capacité de disposer. D’où nous concluons que partager distinctement le sol et la superficie des bois, c’est se conformer à une règle impérative, de laquelle il n’est permis de dévier que dans les circonstances toutes particulières.
L’exécution d’un cantonnement se divise en deux parties ; la première consiste à déterminer la somme fixe en argent, représentative des droits d’usage, tant en bois de chauffage qu’en bois de construction ; et la seconde à désigner la situation et l’étendue de la portion de bois à abandonner pour le cantonnement.
Lorsque l’évaluation des droits d’usage est réduite en argent, l’assiette du cantonnement réclame, de la part des experts chargés de ce travail, une attention consciencieuse et des connaissances qui soient au niveau de ces sortes d’opérations. La loi n’accorde aux propriétaires la faculté d’affranchir leurs fonds de l’usage en bois, que sous la condition de remplacer l’usage par la propriété pleine et entière d’une fraction du sol. Des experts qui ne comprendraient pas leur mission pourraient éluder, en partie du moins, l’intention du législateur, en substituant, d’une manière indirecte, le rachat au cantonnement.
La chose se passerait à peu près de cette manière : on attribuerait à la commune usagère la portion de forêt garnie des taillis les plus forts, et peuplée de la plus belle et de la plus nombreuse futaie ; on lui donnerait ainsi une grande valeur mobilière ou pécuniaire, et par suite une faible part dans le sol. Cependant la commune, ou n’apercevant pas les conséquences de cette déviation des règles, ou séduite par l’appât d’une jouissance prochaine, donnera sa sanction à une opération désastreuse pour son avenir.
Un échange de propriétés boisées peut avoir lieu entre l’état d’une part, et de l’autre une commune ; entre l’état et un particulier, entre deux communes, entre une commune et un particulier, ou enfin entre deux particuliers.
Dans toutes ces combinaisons, moins la dernière, l’échange doit être précédé d’une estimation qui est soumise à des formes légales et qui réclame la distinction entre le sol et la superficie, parce que le contrat implique des intérêts dont on n’a pas l’entière disposition ; la séparation des deux natures de biens est commandée par la nécessité d’éviter l’échange d’une partie du sol contre une valeur mobilière, laquelle valeur serait le prix de vente d’un fonds que, dans l’hypothèse donnée, on n’aurait pas le droit d’aliéner.
Il est clair que dans le cas d’échange entre particuliers jouissant de tous leurs droits, l’estimation des forêts n’a point de forme obligée.
Noirot Bonnet.
Chapitre ix. — Des étangs, de leur utilité, de leur construction et de leur produit.
Section ire. — De l’étendue, de la situation et de l’importance des étangs en France.
Les étangs occupent une assez grande étendue de sol en France : la commission d’agriculture et des arts, dans son rapport général publié en l’an iv, en comptait plus de 14,000 sur une étendue de 100,000 hectares. Cette commission avait établi ses résultats sur des renseignements pris sur les lieux par des commissaires spéciaux envoyés dans les principaux pays d’étangs ; ce mode de procéder l’ayant mise à même de donner un chiffre assez précis sur leur nombre, nous l’admettrons, quoique depuis cette époque ils aient beaucoup plus augmenté que diminué ; mais elle commit de graves erreurs sur leur étendue : ainsi dans le département de l’Ain elle la porta à moins de 9,000 hectares, tandis que les résultats cadastraux recueillis dans les tableaux statistiques, publiés en 1835 par le ministre du commerce, la font monter à 20,000. Dans cette évaluation ne se trouvent pas compris plus de 4,000 hectares en lacs, lisières et ruisseaux.
On conçoit la cause des erreurs de la commission, qui prit pour base de la superficie indiquée les déclarations des pays d’étangs ; les propriétaires qu’on consultait, et qui craignaient toujours d’être contraints au desséchement, crurent de leur intérêt, pour les conserver, d’en diminuer l’étendue, afin que dans ce temps, où l’on voulait tout semer, tout mettre en grains ou pommes de terre, on jugeât moins important de rendre à la culture une faible surface. La dissimulation ne fut sans doute pas partout la même ; mais, en résultat général, elle semble bien avoir été au moins de moitié comme dans le département de l’Ain ; aussi le cadastre a donné, en 1835, 209,000 hectares pour la surface totale des étangs en France, non compris 450,000 en rivières, lacs et ruisseaux. Toutefois, comme dans ces 209,000 hectares se trouvent compris les étangs salés qui ne communiquent pas directement avec la mer et qui sont assez étendus, surtout sur les côtes de la Méditerranée, nous prendrons 200,000 hectares pour la superficie probable des étangs placés dans l’intérieur des terres, et susceptibles par conséquent d’être péchés et desséchés.
Parmi les pays d’étangs, on remarque en premier ordre la Sologne, grand plateau entre la Loire et le Cher, qui s’étend sur trois départements, le Loiret, le Loir-et-Cher et le Cher ; c’est le pays d’étangs dont on a le plus parlé, parce qu’il est le plus près de Paris. Sur 200 lieues carrées, il renferme 1,370 étangs, dont le rapport de la commission ne porte la contenance qu’à 18,000 arpents, au lieu de 17,000 hectares qu’a trouvés le cadastre.
Après la Sologne, vient la Dombes et une partie de la Bresse, département de l’Ain ; le pays inondé, celui où se trouvent les étangs, renferme 60 lieues carrées de 2,000 hectares : leur nombre est porté dans le rapport à 1,667, et leur surface cadastrale est de 20,000 hectares.
On cite ensuite la Brenne, département de l’Indre, où, sur une étendue de vingt communes seulement, 95 étangs couvrent 7,000 hectares.
Les étangs du Forez, département de la Loire, sont placés sur un plateau assez élevé dans le bassin de ce fleuve ; ils couvrent plus de moitié de l’espace de ceux de la Brenne.