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TAILLE ET CONDUITE DES ARBRES FRUITIERS.


continuent leur prolongement ; on a soin, à mesure qu’elles s’élèvent, de leur faire porter, ainsi qu’aux quatre membres inférieurs, autant de ramifications ou bifurcations qu’il est nécessaire pour que le vase soit garni jusqu’au sommet. Chacune des branches qui le composent ayant été originairement palissée pendant qu’elle était encore souple et flexible, a pris sans peine sa place sur le vase ; il faut toujours se reporter, pour leur taille et leur développement successif, à la branche de poirier représentée fig. 273. Les jardiniers n’aiment pas la forme en vase, qui permet difficilement de tailler les arbres en dedans ; ils préfèrent de beaucoup les pyramides, qui sont en effet à tous égards les meilleurs de tous les poiriers, bien entendu après les plein-vent.

D. — Poirier en girandole.

On donne quelquefois au poirier la forme dite en girandole, représentée (fig. 280) ; c’est une véritable pyramide interrompue par des intervalles dégarnis. La manière de l’établir ne diffère en rien du procédé que nous avons décrit pour la formation des pyramides ; on a soin seulement de supprimer tous les bourgeons qui pourraient naître sur les parties de la flèche qui doivent devenir sur le tronc des intervalles vides. Quelques espèces de poiriers, dont le fruit a besoin de beaucoup d’air et de lumière pour parvenir à parfaite maturité, se conduisent sous cette forme moins usitée qu’elle ne devrait l’être si l’on en appréciait mieux les avantages. Celte forme, de même que la pyramide, ne peut se maintenir qu’en surveillant avec un soin extrême l’équilibre de la sève ; ainsi, toutes les branches trop vigoureuses qui sembleraient disposées à s’emporter seront taillées court, sur un œil inférieur peu développé ; toutes les branches minces et délicates seront taillées long sur leur meilleur œil. La sève, trouvant issue dans plusieurs yeux bien conformés, s’y portera de préférence, et rendra bientôt ces branches faibles capables de faire équilibre aux rameaux plus forts rabattus sur un œil faible ; tout dépend de l’observation rigoureuse de ce précepte (voir Jardin fruitier).

Fig. 280.

§ VIII. — Recépage et restauration d’un vieux poirier.

Il n’y a aucun profit réel à user les arbres jusqu’au bout. On peut bien, pendant un temps plus ou moins long, prolonger leur âge fertile en renouvelant les rameaux fatigués ; mais, en définitive, ces rajeunissements ont un terme : la sève finit par ne plus trouver de passage dans les rameaux épuises ; les racines, affaiblies par l’âge, ne peuvent plus envoyer une sève suffisante à la charpente à demi desséchée ; les extrémités meurent les premières ; la vie se retire peu à peu vers la partie inférieure de l’arbre qui finit par mourir. Longtemps avant sa fin, il n’a plus la force de produire : s’il fleurit encore, la fleur ne noue pas, ou s’il en noue quelqu’une, le fruit tombe avant maturité. Quelquefois, quand le sol est bon et que l’arbre appartient à une espèce vigoureuse, les yeux qui sommeillaient à la base des branches s’ouvrent en bourgeons ; c’est un effort de la nature vers la rénovation du poirier ; le jardinier doit suivre cette indication. Dès qu’un poirier donne des signes évidents de décadence, il faut, sans balancer, quelle que soit sa forme, le recéper. On nomme recépage un ravalement sur le tronc ou sur les branches -mères, qui ne laisse à l’arbre rien de sa vieille charpente. Voyons de quelle manière on peut lui en former une nouvelle. Si la terre est très fertile et que le poirier ait été recépé dans un âge qui lui laisse encore de la vigueur, il suffira d’unir avec la serpette ou le planeur les plaies des amputations, et de les recouvrir d’onguent de Saint-Fiacre ou de cire à greffer. Dès que la sève entrera en mouvement, les racines n’ayant plus à nourrir que les yeux latents, leur enverront une telle abondance de sève qu’il en résultera des bourgeons vigoureux, lesquels se mettront promptement en équilibre avec les racines ; il n’y aura plus dès lors qu’à traiter ces bourgeons exactement comme ceux d’un jeune arbre, selon la forme qu’on lui destine ; l’arbre se refera promptement. Quand les choses se passent ainsi, la besogne est fort simple ; la place laissée vide par le recépage du vieil arbre est bien plus tôt remplie que si l’on eût mis un jeune arbre à la place de l’ancien. En général, à moins de changer le sol, ce qui dans une grande plantation est toujours très dispendieux et quelquefois impossible, rien n’est plus difficile que de faire pousser d’une manière satisfaisante un jeune arbre dans la terre où un autre arbre de la même espèce vient d’achever le cours entier de sa végétation. Mais, le plus souvent, le recépage tel que nous venons de l’indiquer, ne réussit pas : les bourgeons provenant d’yeux longtemps endormis n’ont pas une vigueur suffisante ; après avoir langui quelque temps, ils se dessèchent et meurent. Si l’on arrache un de ces poiriers qu’on aurait ainsi essayé de rajeunir, on voit que les jeunes rameaux, avant de mourir, ont essayé d’envoyer dans le sol de jeunes racines, et qu’ils sont morts dans ce travail trop fort pour eux, sans pouvoir l’accomplir. Si l’on sacrifie un des arbres dont le recépage a réussi, l’on peut suivre les traces visibles de la formation des ra-