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liv. ier.
AGRICULTURE : ENGRAIS.

langes pourront couvrir comme engrais, se rappelant que 3,000 kil. de sang liquide donnent 750 kil. de sang coagulé et séché qui suffit à la fumure d’un hectare. 100 kilogr. de sang en cet état équivalent, comme engrais, à 300 kilogr. d’os concassés, ou six voies de bon fumier de cheval, pesant ensemble 7,200 kil. C’est un engrais de beaucoup supérieur à tous ceux connus et désignés sous les noms de poudrette, tourteaux, etc. ; il ne le cède qu’à la viande séchée mise en poudre.

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§ iii. — Issues, vidanges et déchets des boyaux.

Toutes les parties internes des animaux, telles que le foie, les poumons, la cervelle, le cœur, ainsi que les déchets de boyaux, doivent être hachées le plus menu possible, puis mélangées, ainsi que la vidange des intestins, avec de la terre fortement séchée, celle-ci dans la proportion de six fois le volume des matières animales. Lorsque cette composition est bien malaxée à la pelle, on la répand sur les sols à fumer, dans la proportion d’un kilogramme par mètre de superficie ou 10,000 kilogr. par hectare. Cet engrais donne de très-bons résultats : il est notamment très-favorable à la végétation du blé. Si l’on ne pouvait pas le répandre immédiatement après la préparation, il faudrait le conserver dans une fosse ou tout autre endroit frais, et, dans tous les cas, à l’abri ou recouvert de terre.

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§ iv. — Os : explication des divers résultats de leur emploi dans l’agriculture.

Aucune des substances dures, débris de l’organisation animale, n’offre de plus remarquables exemples d’effets variés dans son action comme engrais que les os sous différens états. On trouve dans les nombreux mémoires agricoles y relatifs les plus singulières questions que la pratique puisse laisser à résoudre.

Les os, qui se trouvent en masses assez importantes à la disposition des agronomes et des spéculateurs, se présentent sous les différentes formes suivantes : Frais, tels qu’ils ont été extraits des animaux récemment abattus, plus ou moins divisés, et entiers : sous chacun de ces trois états, leur décomposition est presque toujours trop lente, activée d’ailleurs par les influences bien connues de l’air, de la température et de l’humidité ; mais, toutes choses égales d’ailleurs, on avait observé des différences énormes et qui semblaient inexplicables dans la durée de la décomposition, et par conséquent dans l’effet utile produit en un temps donné.

Des expériences spéciales m’ont conduit à démontrer la cause de ces anomalies apparentes. Les os contiennent, dans leurs parties celluleuses et dans diverses cavités, une substance grasse, sécrétée à part, plus ou moins consistante. Cette substance est libre dans le tissu adipeux de toutes les anfractuosités qui la recèlent, car il suffit de lui ouvrir un passage, en les tranchant, et de plonger les os ainsi coupés dans l’eau bouillante, pour la faire sortir et la voir aussitôt nager à la superficie du liquide. La proportion moyenne que l’on peut obtenir des divers os de boucherie est d’environ 0,1, bien que les parties très-spongieuses, qui en renferment le plus, en contiennent jusqu’à 0,5.

La proportion de la matière grasse extraite par ce procédé diminue graduellement au fur et à mesure que les os se dessèchent. Elle devient presque nulle lorsque la dessiccation a lieu sous une température élevée, soit au soleil, soit à l’étuve. On conçoit, en effet, qu’au fur et à mesure de l’évaporation de l’eau qui remplissait les interstices de la substance des os, la graisse liquéfiée par la chaleur a pu graduellement prendre sa place. Un des effets de cette pénétration a été d’imprégner le réseau organique qui renferme le phosphate et le carbonate de chaux. Ce réseau, déjà difficilement attaquable par suite de sa cohésion et de son insolubilité, défendu, d’ailleurs, par les substances inorganiques interposées, est devenu bien moins altérable encore lorsque la matière grasse, non seulement l’imprègne et le défend de la pénétration de l’eau, mais encore lorsque, peu-à-peu acidifiée, elle forme avec la chaux un savon calcaire, dont M. d’Arcet a démontré l’inaltérabilité sous les influences atmosphériques. Les os, dans cet état si difficilement altérables, ne doivent donc exercer qu’une action insensible comme engrais, à moins qu’ils ne soient excessivement divisés. Ce qui confirme et explique encore l’observation pratique qui semblait anomale, c’est que, mis pendant quatre années dans la terre, ces os ont à peine perdu 0,08 de leur poids, tandis que tout récemment extraits des animaux et privés par l’eau bouillante de la presque totalité de la graisse, ils laissent facilement altérer leur réseau organique et perdent dans le même temps de 25 à 30 centièmes de leur poids. Voici trois autres résultats curieux et singuliers en apparence, de l’emploi des os traités à la vapeur.

Les os concassés dont on a obtenu de la gélatine par l’action de l’eau et de la température dans divers appareils, forment un résidu dont l’application comme engrais a été maintes fois essayée. Dans quelques expériences, plusieurs agriculteurs ont obtenu de ces résidus, la première année, plus d’effet utile que des os eux-mêmes. Dans d’autres, une action à peu près égale à celle des os, mais peu durable, fut observée. Enfin, plus généralement on obtint très-peu ou point d’influence favorable sur la végétation. Des analyses multipliées et leur discussion attentive m’ont permis d’apercevoir l’état différent sous lequel ce résidu, en apparence le même, produisait trois sortes de phénomènes si tranchés.

Les os, traités par le procédé en question, laissent un résidu variable ; je l’ai rencontré tantôt contenant de 80 à 95 centièmes de la matière organique azotée altérable des os, tantôt en renfermant seulement 25 à 33, plus ordinairement 1 à 2 p. % ; enfin, quelquefois à peine quelques millièmes. Voici les causes et les effets de ces proportions variées : La température est presque toujours élevée dans ces opérations, au point de rendre la plus grande partie du réseau soluble, et, par con-