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chap. 2e.
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Sols sableux.

y réussissent, qu’elles se trouvent dans les vallées, et par conséquent dans une position qui n’exclut pas toute humidité à l’époque des chaleurs estivales. Bosc, qui avait parcouru en tous sens la plupart des contrées granitiques de la France, recommandait le turneps comme une des plantes les plus propres à y donner aux bestiaux une nourriture à la fois abondante et très-succulente. « Ce qui doit encore plus engager à le semer dans ces sortes de sols, c’est, dit-il, que les bestiaux, quoiqu’en général de petite taille, y réussissent fort bien. Les chevaux y sont fins et vifs, voyez ceux du Limousin ; les bœufs ardens au travail, voyez ceux de l’Auvergne ; les moutons y ont la chair savoureuse, voyez ceux des Ardennes. Sous le double rapport de la production des engrais qui manquent surtout aux terres granitiques et de la valeur des animaux, les habitans de ces pays doivent donc se livrer de préférence aux spéculations qui ont pour but l’éducation des bestiaux, même des volailles, puisque, comme chacun sait, c’est du revers des Cévennes et du Limousin que sortent ces excellentes cuisses d’oies dont on fait un fort grand commerce. »

Presque toutes les montagnes granitiques de l’est de la France sont couvertes de beaux chênes et de châtaigniers dont les fruits font, pendant une partie de l’année, la base de la nourriture des hommes et de certains animaux, comme les cochons et la volaille, auxquels ils donnent en peu de temps une fort bonne graisse.

IV. Les terres volcaniques sont aussi plus communes dans l’est que dans toute autre partie de la France. C’est en Auvergne et en Languedoc, c’est-à-dire dans le Cantal, le Puy-de-Dôme, la Haute-Loire, l’Hérault, etc. qu’il faut aller les étudier. Généralement ce sont encore des terres légères, faciles à distinguer par leur couleur noire ou noirâtre, souvent pulvérulentes, et qui exigent les mêmes cultures que les terres sableuses ou sablo-argileuses. — Jusqu’ici, sans qu’on ait pu se rendre bien compte du pourquoi, elles sont, lorsqu’on peut leur procurer en été une humidité suffisante, d’une fertilité qui dépasse de beaucoup, non seulement celle des sols granitiques avec lesquels elles offrent cependant d’assez nombreux rapports, mais encore celle de la plupart des autres sols connus. — Les cendres de laves, pendant long-temps impropres à toute végétation, acquerraient-elles, et conserveraient-elles après des siècles une propriété stimulante ? — Quoi qu’il en soit, dans des circonstances ordinaires, les céréales, les plantes fourrageuses, et tous les végétaux économiques des terres légères, croissent avec plus de vigueur sur les débris des anciens volcans que partout ailleurs. — Il n’est personne qui n’ait entendu parler des châtaigniers monstrueux du mont Etna.

V. Terres sablo-argilo-ferrugineuses. — Elles ont deux inconvéniens de plus que les terres simplement sablonneuses. — La couleur brunâtre ou violâtre qu’elles doivent à l’oxide de fer, et qui les caractérise autant au moins que leur fâcheuse disposition à s’agglomérer en espèces de pouddingues plus ou moins compactes, les rend d’un accès plus facile encore à l’excessive chaleur, et la surabondance de cet oxide s’oppose parfois complètement à toute végétation. — Il est presque toujours préférable de les cultiver en bois que de toute autre manière. Les taillis de châtaigniers y donnent de lents, mais de bons produits. Les bouleaux y croissent bien, et divers autres arbres peuvent, sinon y prospérer, du moins y végéter avec assez de force pour acquérir de la valeur.

À force d’engrais peu chauds, on peut aussi risquer sur de semblables terrains la culture du seigle, mais on doit s’attendre à le voir manquer complètement, pour peu que les pluies ne soient pas fréquentes pendant la belle saison. — Au moyen d’arrosemens plus multipliés qu’abondans, on obtient généralement dans les sables ferrugineux, en fruits maraîchers et en racines légumineuses, des produits d’une excellente qualité.

VI. Terres de sable de bruyères. Ces terres, que je placerais au rang des meilleures et des plus utiles en jardinage, sont, au contraire, des moins fertiles pour la grande culture. — Elles contiennent cependant, uni à un sable ordinairement très-fin, à une petite quantité d’alumine et d’oxide de fer, une quantité de terreau considérable, dû à la décomposition successive des plantes qui les recouvrent. — Quand elles se trouvent dans des circonstances favorables, leur fertilité est très-grande, au moins pour beaucoup de plantes ; mais, d’une part, comme il n’est que trop facile de s’en convaincre en parcourant les vastes landes de Bordeaux, celles de la Bretagne, de la Sologne, etc., elles offrent rarement assez de profondeur, ou elles reposent sur un sous-sol argileux qui retient l’eau de manière à ce qu’elles deviennent de véritables marais pendant l’hiver, tandis qu’elles se dessèchent complètement pendant l’été ; de l’autre, elles ont trop peu de consistance. — Le seul moyen de remédier à ce double inconvénient, c’est de faciliter l’écoulement des pluies, et de défoncer.

Pour atteindre le premier but, on fait des fossés, ou, si le terrain ne présente pas une pente suffisante, on creuse, de distance en distance, aux endroits les plus bas, de petits étangs, qui n’ont pas d’ailleurs l’unique avantage d’assainir la surface du sol. — Lors même qu’ils ne sont pas susceptibles de recevoir du poisson, ils donnent naissance à des plantes aquatiques que les cultivateurs ont grand soin de retirer pour les transformer en engrais, et ils se couvrent sur leurs bords d’herbes, que leur mauvaise qualité n’empêche pas d’utiliser, faute de meilleurs ou de suffisans pâturages. — Quant aux moyens d’augmenter la masse de terre labourable, nous reviendrons nécessairement sur cet important sujet en traitant prochainement des défrichemens.

Dans la plupart des pays de landes, après avoir ensemencé deux ou trois ans de suite une petite partie du sol en seigle, en sarrazin, en pommes-de-terre, etc., on le laisse en jachères beaucoup plus long-temps. — Cependant, dans la Campine, où de vastes landes d’un sable très-maigre reposent sur un fond