Page:Maistre - Du pape suivi de l'Église gallicane, Goemaere, 1852.djvu/103

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

CHAPITRE III.


DU JANSÉNISME. PORTRAIT DE CETTE SECTE.


L’Église, depuis son origine, n’a jamais vu d’hérésie aussi extraordinaire que le jansénisme. Toutes en naissant se sont séparées de la communion universelle, et se glorifiaient même de ne plus appartenir à une Église dont elles rejetaient la doctrine comme erronée sur quelques points. Le jansénisme s’y est pris autrement : il nie d’être séparé ; il composera même, si l’on veut, des livres sur l’unité dont il démontrera l’indispensable nécessité. Il soutient, sans rougir ni trembler, qu’il est membre de cette Église qui l’anathématise. Jusqu’à présent, pour savoir si un homme appartient à une société quelconque, on s’adresse à cette même société, c’est-à-dire à ses chefs, tout corps moral n’ayant de voix que par eux ; et dès qu’elle a dit : Il ne m’appartient pas ; ou il ne m’appartient plus, tout est dit. Le janséniste seul prétend échapper à cette loi éternelle ; illi robur et œs triplex circa frontem. Il a l’incroyable prétention d’être de l’Église catholique, malgré l’Église catholique ; il lui prouve qu’elle ne connaît pas ses enfants, qu’elle ignore ses propres dogmes, qu’elle ne comprend pas ses propres décrets, qu’elle ne sait pas lire enfin ; il se moque de ses décisions ; il en appelle ; il les foule aux pieds, tout en prouvant aux autres hérétiques qu’elle est infaillible et que rien ne peut les excuser.

Un magistrat français de l’antique roche, ami de l’abbé