Page:Maistre - Les Soirées de Saint-Pétersbourg, Pélagaud, 1854, I.djvu/17

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
vij

altère en lui l'image de Dieu pour l'accommoder à ses passions, ou, par une passion plus détestable encore, il pousse la fureur jusqu^à l'en effacer entièrement. Le premier de ces deux crimes fut, dans les anciens temps, celui de tous les peuples du monde, un seul excepté ; ils eurent toujours pour le second une invincible horreur, et les malheureux qui sVn rendaient coupables furent longtemps eux-mêmes une exception au milieu de toutes les sociétés. C'est que cette dernière impiété attaquait à la fois Dieu et l'existence même des sociétés ; le bon sens des peuples l'avait pressenti : et, en effet, lorsque la secte infime d'Epicure eut étendu ses ravages au milieu de l'empire romain, on put croire un moment que tout allait rentrer dans le chaos. Tout était perdu sans doute, si la Vérité elle-même n’eût choisi ce moment pour descendre sur la terre et pour y converser avec les hommes (1). Les anciennes traditions se ranimèrent aussitôt, purifiées et sanctifiées par des vérités nouvelles ; la société, qui déjà n^était plus qu’un cadavre prêt à se dissoudre, reprit le mouvement et la vie, et ce principe de vie, que lui avaient rendu les traditions religieuses, ne put être éteint ni par les révolutions des empires, ni par une longue suite de ces siècles illettrés qu^il est convenu d’appeler barbares. Les symptômes de mort ne reparurent qu’au quinzième siècle, qui est appelé le siècle de la renaissance : c’’est alors que la

(I) El cum hommibus conversât us esU ( Barucli » III, 58.) a.