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Page:Maistre Xavier de - Oeuvres completes, 1880.djvu/152

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sais d’une des plus belles vues qu’on puisse imaginer. Mais la plus belle vue nous fatigue bientôt lorsqu’on la voit trop souvent : l’œil s’y habitue, et l’on n’en fait plus de cas. La situation de ma fenêtre me préservait encore de cet inconvénient, parce que je ne voyais jamais le magnifique spectacle de la campagne de Turin sans monter quatre ou cinq échelons, ce qui me procurait des jouissances toujours vives, parce qu’elles étaient ménagées. Lorsque, fatigué, je voulais me donner une agréable récréation, je terminais ma journée en montant à ma fenêtre.

Au premier échelon, je ne voyais encore que le ciel ; bientôt le temple colossal de Supergue[1] commençait à paraître. La colline de Turin sur laquelle je repose s’élevait peu à peu devant moi couverte de forêts et de riches vignobles, offrant avec orgueil au soleil couchant ses jardins et ses palais, tandis que des habitations simples et modestes semblaient se cacher à moitié dans ses vallons, pour servir de retraite au sage et favoriser ses méditations.

Charmante colline ! tu m’as vu souvent recher-

  1. Ou la Superga, église magnifique élevée par le roi Victor-Amédée Ier, en 1706, pour l’accomplissement du vœu qu’il avait fait à la vierge, si les Français levaient le siège de Turin. La Superga sert de sépulture aux princes de la maison de Savoie. (Note de l’Auteur.)