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Page:Maistre Xavier de - Oeuvres completes, 1880.djvu/254

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tout avait dû contribuer à ma perte, j’entendis l’écho qui, du milieu des ruines du château de Bramafan, répéta distinctement : Malheur à toi ! Je m’arrêtai, saisi d’horreur, sur la porte de la tour, et l’écho faible de la montagne répéta après : Malheur à toi !

Je pris une lampe, et, résolu de mettre le feu à mon habitation, je descendis dans la chambre la plus basse, emportant avec moi des sarments et des branches sèches. C’était la chambre qu’avait habitée ma sœur, et je n’y étais plus rentré depuis sa mort : son fauteuil était encore placé comme lorsque je l’en avais retirée pour la dernière fois ; je sentis un frisson de crainte en voyant son voile et quelques parties de ses vêtements épars dans la chambre : les dernières paroles qu’elle avait prononcées avant d’en sortir se retracèrent à ma pensée : « Je ne t’abandonnerai pas en mourant, me disait-elle ; souviens-toi que je serai présente dans tes angoisses. » En posant la lampe sur la table, j’aperçus le cordon de la croix qu’elle portait à son cou, et qu’elle avait placée elle-même entre deux feuillets de sa Bible. À cet aspect, je reculai plein d’un saint effroi. La profondeur de l’abîme où j’allais me précipiter se présenta tout à coup à mes yeux dessillés ; je m’approchai en tremblant du livre sacré : « Voilà, voilà, m’écriai-je, le