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Page:Maistre Xavier de - Oeuvres completes, 1880.djvu/328

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seule un voyage périlleux, qui peut te conduire à ta perte et leur coûter la vie, au lieu de leur procurer la liberté ? » À ces raisons Prascovie ne répondait que par des larmes ; niais sa volonté n’était point ébranlée, et chaque jour l’affermissait dans sa résolution.

Il se présentait une difficulté d’une autre nature, et plus réelle encore que l’opposition de son père : elle ne pouvait partir qu’avec un passe-port, sans lequel il ne lui était pas même possible de s’éloigner du village. D’autre part, il n’était guère probable que le gouverneur de Tobolsk, qui n’avait jamais répondu à leurs lettres, consentît à leur accorder cette faveur. Prascovie fut donc forcée de remettre son départ à un autre temps, et toutes ses idées se portèrent sur les moyens d’obtenir un passe-port.

Il y avait alors dans le village un prisonnier nommé Neiler, né en Russie et fils d’un tailleur allemand. Cet homme avait été pendant quelque temps domestique d’un étudiant à l’université de Moscou, et il avait tiré de cette circonstance l’avantage de passer pour un esprit fort à Ischim. Neiler s’imaginait être un incrédule. Cette espèce de folie, jointe au métier plus utile de tailleur qu’il possédait, l’avait fait connaître des habitants et des prisonniers, dont