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Page:Maistre Xavier de - Oeuvres completes, 1880.djvu/335

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femmes les mots slavons qu’elles ne comprenaient pas, et cette occupation plaisait infiniment à sa fille. À la fin d’une triste soirée, ces trois solitaires étaient auprès d’une table sur laquelle était le livre saint ; la lecture était achevée, et le plus morne silence renaît entre eux, lorsque Prascovie s’adressant à sa mère, sans autre but que celui de renouer la conversation : « Ouvrez, je vous prie, la Bible, lui dit-elle, et cherchez dans la page à droite, la onzième ligne. » Sa mère prit le livre avec empressement et l’ouvrit avec une épingle ; ensuite, comptant les lignes jusqu’à la onzième à droite, elle lut à haute voix les paroles suivantes :

« Or un ange de Dieu appela Agar du ciel et lui dit : Que faites-vous là ? ne craignez point. »

L’application de ce passage de l’Écriture sainte était trop facile à faire pour que l’analogie frappante qu’il présentait avec le voyage projeté pût échapper à personne. Prascovie, transportée de joie, prit la Bible et en baisa les pages à plusieurs reprises. C’est vraiment singulier, n disait la mère en regardant son mari. Mais celui-ci, ne voulant pas favoriser leur idée à ce sujet, s’éleva fortement contre ces ridicules divinations. « Croyez-vous, disait-il aux deux femmes, que l’on puisse ainsi interroger Dieu en ouvrant un livre avec