Page:Maistre Xavier de - Oeuvres completes, 1880.djvu/343

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moments ensemble, comme si l’on voulait tromper la destinée et lui dérober cette courte jouissance.

Prascovie reçut à genoux la bénédiction de ses parents, et, s’arrachant courageusement de leurs bras, quitta pour toujours la chaumière qui lui avait servi de Frison depuis son enfance. Les deux exilés l’accompagnèrent pendant la première verste. Le père et la mère, immobiles sur le seuil de la porte, la suivirent longtemps des yeux, voulant lui donner de loin un dernier adieu ; mais la jeune fille ne regarda plus en arrière, et disparut bientôt dans l’éloignement.

Lopouloff et sa femme rentrèrent alors dans leur triste demeure, qui désormais allait leur paraître bien déserte. Les malheureux vécurent encore plus isolés qu’auparavant : les autres habitants d’Ischim accusaient le père d’avoir lui-même poussé sa fille à cette imprudente entreprise, et le tournaient en ridicule à ce sujet. On se moquait surtout des deux prisonniers, qui, dans leur simplicité, n’avaient pas caché la promesse que Prascovie leur avait faite de s’intéresser à eux, et on les félicitait d’avance sur leur bonne fortune.

Laissons maintenant cette région de peines et suivons notre intéressante voyageuse. Lorsque les deux amis qui l’avaient accompagnée la quittèrent,