Page:Maistre Xavier de - Oeuvres completes, 1880.djvu/411

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Elle avait les yeux très-noirs, le front découvert, une certaine tranquillité mélancolique dans le regard et jusque dans le sourire.

Elle connaissait la nature et tous les dangers de sa maladie : toutes ses pensées étaient tournées vers un autre monde qu’elle attendait sans crainte et sans impatience, comme une vaillante ouvrière qui a fini sa journée et qui se repose en attendant la récompense qui lui est due.

Quand les affaires de l’abbesse furent terminées, les deux religieuses se disposèrent à retourner à Nijeni. La veille de son départ, Prascovie sortit pour prendre congé de quelques amis qui lui avaient envoyé leur voiture : en entrant dans leur maison, elle trouva sur l’escalier une jeune fille assise sur les dernières marches, et dans le costume de la plus grande misère. La mendiante, la voyant suivie d’un laquais à livrée, se leva péniblement pour lui de-, mander l’aumône, et lui présenta un papier qu’elle tira de son sein. « Mon père est paralytique, dit-elle, et n’a d’autres secours que l’aumône que je reçois ; je suis moi-même malade, et bientôt Je ne pourrai plus l’aider. » Prascovie prit le papier d’une main empressée et tremblante : c’était une attestation de pauvreté et de bonne conduite donnée par le prêtre de la paroisse. Elle se souvint aussitôt du