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tion que, d’habitude, le père accompagnait à la messe sa femme et les enfants, pourvu que ce ne fût pas à la messe des patronages. Au lieu du missel, il prenait alors un Évangile, l’Imitation ou les Psaumes, dont il avait des exemplaires en latin.

Il les lisait avec cet air de goûter lentement et parfois ce demi-sourire qu’Augustin connaissait bien, qu’il lui voyait, par exemple, à lire Virgile.

Plus tard, il s’en étonna pour d’autres raisons encore. La lecture du professeur était considérable, en particulier sur l’histoire du sentiment religieux et mystique à la fin du XVIe et au début du XVIIe siècle. C’était le sujet général où s’encadrait sa thèse. Les bibliothèques ecclésiastiques de la ville avaient été dépouillées par lui dans la limite de ses loisirs. Il existait à l’Évêché, au grand Séminaire et chez quelques chanoines qui se les transmettaient de l’un à l’autre à cause de mort, comme disent les actes notariés, de beaux vieux livres de Coton, de Bourdoise, d’Eudes, de Condren. La Bibliothèque municipale conservait un fonds provenant de l’ancienne abbaye des Bois de Chaudefonds, avec catalogue en calligraphie du XVIIe siècle. Le professeur avait passé là de belles heures, dans les salles basses du vieux couvent des Jacobins, où se trouvaient les archives départementales et la bibliothèque.

En ce que son père avait écrit, Augustin discerna plus tard une certaine richesse et hauteur de pensée, où tout n’était pas consentement.

Pourquoi s’arrêtait-il à cette demi-pratique ? Répugnance sentimentale à la confession ? Indifférence dogmatique ? Respect humain ? Économie spontanée d’activité ? Augustin n’avait nul moyen de choisir entre ces hypothétiques dispositions d’esprit et ne se fût personnellement accommodé d’aucune.

Il comprit plus tard que les choses étaient plus complexes qu’il ne supposait à cette date.

Ils trouvèrent Mme Méridier sur le trottoir, devant la maison, un panier au bras, plein de linge et de provisions :