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Page:Malato - La Grande Grève.djvu/197

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octroyer de l’autre. Il faut bien nous payer, si peu que ce soit, pour notre travail, les machines ne pouvant nous remplacer entièrement…

— Oh ! les machines, interrompit un travailleur plus âgé, il faudrait les briser !

— Non : il faudrait les prendre. Donc on est forcé de nous payer, juste assez pour que nous puissions vivre et reproduire une race de malheureux comme nous, travaillant à perpétuité pour les maîtres. Mais, en même temps, nous sommes tenus de nous fournir du nécessaire, aliments et vêtements, dans les cantines installées par la Compagnie.

— Où l’on ne vend que de la camelote, déclara un troisième.

— Et défense de nous fournir ailleurs. De sorte que l’argent qui nous a été versé le samedi revient presque tout entier le dimanche à nos patrons.

— Si la concurrence des commerçants était permise, on serait forcé de nous vendre meilleur et moins cher.

— Oui, mais elle n’est pas permise, voilà le hic. La municipalité est aux ordres de la direction.

C’est en petit l’histoire de la société, mes amis. Le gouvernement nous paraît quelque chose de bien grand, de bien redoutable : eh bien, on se trompe. Ceux qui le mènent et qui tiennent les fils, ce sont les capitalistes. Le gouvernement est comme un gendarme chargé de défendre un coffre-fort.

Une chose était remarquable, la modération de langage de ces durs travailleurs. Certes, ils exprimaient des idées aussi catégoriques que possible sur le régime capitaliste ; mais cela était dit simplement, sans aucun de ces grands mots et de ces épithètes terribles qui souvent recouvrent le vide absolu de la pensée.

Les mineurs de Mersey savaient qu’ils étaient exploités ; ils ressentaient profondément cette exploitation et cherchaient les moyens de l’atténuer, en