teur Paryn, et puis après nous formulerons tranquillement nos revendications. Si on les méconnaît, alors… la grève !
La grève ! Ce mot, lancé comme une bombe, produisit une singulière impression sur les mineurs.
Bernard avait parlé posément, en homme qui mesure ses phrases et ne se laisse point emporter plus loin qu’il ne veut aller. D’une instruction supérieure à celle de ses compagnons, il puisait dans les brochures socialistes des matériaux, mais non point des idées toutes faites, estimant que tout être doit penser avec son cerveau. Avant d’admettre une opinion, il l’avait analysée, retournée sous toutes ses faces et, une fois qu’il l’avait admise, il cherchait les moyens pratiques de la réaliser.
Il ne se réclamait d’aucune école et ne se disait même pas indépendant, car ce titre, qui devrait être le plus beau, sert trop souvent à masquer le vide de convictions ou d’idées, l’absence de droiture, les compromissions honteuses avec tous les partis.
Bernard eût été de préférence collectiviste, mais il se disait qu’aucun système ne peut prétendre à l’infaillibilité, de même qu’aucun cerveau ne peut déterminer autrement que dans ses grandes lignes l’évolution à venir des sociétés humaines. Il y avait, en outre, à la fois dans la doctrine collectiviste et dans les allures du parti une rigidité dogmatique qui lui déplaisait ou, du moins, qui ne s’accordait pas avec son caractère, car, somme toute, il trouvait utile qu’à côté des opportunistes il y eût des sectaires. C’était une compensation.
Artiste ou poète au lieu d’être ouvrier, il eût été vraisemblablement anarchiste, car l’anarchie, vision d’une humanité future, est plutôt considérée comme la sublimation de l’individu dans une société évoluée que comme la révolte spontanée et anonyme des masses. Elle tend à méconnaître parfois les nécessités économiques immédiates pour planer en