Presque partout autour de lui, s’élançaient, à des altitudes variables, des pics, quelques-uns arides, d’autres couverts d’une végétation sombre. Au sud se profilait, violacée sous les rayons solaires, la masse du Ouitchambo.
Vers l’est apparaissait la silhouette d’un autre géant, le mont Humboldt.
Et au nord, séparé de lui par un abîme insondable de forêts d’où émergeaient les pins colonnaires et les panaches des cocotiers, s’étendait, bornant la vallée de Thio et la côte de Bourendy, l’azur sans limite de l’océan.
Cette vue fit battre fortement le cœur de Détras qui oublia toutes ses souffrances, la fatigue, la faim, la soif. Cette mer, qui le séparait des êtres chéris, c’était la barrière, mais c’était aussi la route. Un jour, il l’espérait maintenant, il voguerait sur ces flots bleus pour retourner dans la vieille Europe.
Et il demeurait immobile, hypnotisé par son rêve, buvant des yeux cet océan.
Bonheur inespéré, une averse torrentielle éclata, qui trempa Détras jusqu’aux os, mais lui permit d’apaiser la plus intolérable de ses souffrances : la soif ! Il recueillit l’eau dans ses mains, dans son chapeau, dans ses souliers, dans sa calebasse tarie. Ce fut une douche bienfaisante qui dura trois heures et guérit miraculeusement son pied malade.
Certes, ses épreuves n’étaient pas finies, elles commençaient à peine. Pendant quatre jours, l’évadé, n’ayant pour se guider vers la mer que la position du soleil, erra dans des déserts de montagnes et de forêts, se nourrissant de fruits lorsqu’il en rencontrait, de plantes plus souvent, dormant caché sous les broussailles, souvent ne dormant pas du tout.
Il était maigre comme un squelette lorsqu’il arriva sur la côte de Bourendy, à quelques kilomètres de Thio, localité minière pourvue d’un poste de gendarmerie.