Page:Malato - La Grande Grève.djvu/264

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laissait retomber à terre du haut de son rêve déçu. Pourtant, sous le regard impérieux et passablement ironique du policier, il réprima toute manifestation de mauvaise humeur. Après tout, un travail allégé et un supplément quotidien d’un franc, c’était toujours quelque chose.

— J’accepte, balbutia-t-il.

— Il le faut bien, riposta Moschin. Les places de chef de mine ne se distribuent pas à la pelle, mais si je continue à être content de vous, je verrai ce que je pourrai faire.

Sur ces paroles, qui lui laissaient de l’espoir, Canul s’était retiré.

— Évitez à la fois la tiédeur et les allures trop violentes qui pourraient vous faire suspecter, lui avait recommandé son chef.

Il s’était conformé à ce sage conseil. Jusqu’alors d’ailleurs, sa tâche n’avait pas été trop absorbante, le syndicat évitant toute politique de lutte. Aussi Canul ne put-il faire grand mal ; Bernard échappa même à sa surveillance. Sans doute le fait que ce dernier avait décliné toute fonction dans le bureau du syndicat le faisait-il considérer par le mouchard comme un adhérent ordinaire. Puis, par une coïncidence bizarre, Canul, qui en prenait à l’aise avec son service d’espionnage, ne s’était pas trouvé présent aux réunions où Bernard avait pris la parole.

Le soir même de la réunion du Fier Lapin, Moschin envoya un des hommes de sa police chercher Canul qui accourut aussitôt, obséquieux, plein d’un vague espoir.

— Je vous fais mon compliment ! dit froidement l’homme de confiance du baron des Gourdes.

— Qu’y a-t-il donc, chef ? murmura le mouchard déconcerté par ce préambule.

— Il y a que vous faites votre service comme un cochon, répondit brutalement Moschin, qui ne pre-