Page:Malato - La Grande Grève.djvu/296

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Il tenait maintenant la trace sûre, autant dire l’adresse de ceux qu’il cherchait. Le renseignement du mouchard, complétant celui de Justin, allait lui permettre de retrouver Panuel, Geneviève et Berthe.

Berthe ! Cette enfant qu’il n’avait pas connue remplissait son cœur d’une tendresse profonde, infinie.

Berthe savait-elle seulement qu’elle avait un père ? Sa mère avait-elle conservé le nom de Détras ?

Cela, l’évadé n’avait osé le demander au mouchard.

Cependant, ce dernier s’était avancé sur le seuil de la porte et regardait le voyageur s’éloigner.

— Va-t-il tourner sur Chôlon ? se demandait-il. Il faudrait le suivre.

Et Détras étant déjà assez éloigné pour ne pas entendre, Martine appela :

— Joséphine ! Joséphine ! Allons, vite !

Essoufflée, suante, la sœur du mouchard apparut. Depuis qu’elle était devenue Mme  Mayré, elle avait repris son prénom de Joséphine, abandonné, pendant qu’elle était en service, pour celui, plus domestique, de Marie.

— Installe-toi ici ou ferme la boutique, je pars, dit rapidement Martine.

— Hein ?

— Peut-être pour deux jours, peut-être pour plus. Je vais prendre l’argent qui est en caisse.

Tout en parlant, Martine ouvrait le tiroir et comptait la monnaie.

— Douze francs cinquante, fit-il en empochant. Avec huit que j’ai sur moi, cela suffira.

Stupéfaite, subjuguée, Joséphine le regardait sans dire un mot.

D’un autre tiroir, Martine sortit un petit revolver chargé et le mit dans la poche de sa jaquette. Il ouvrit un placard, en tira un chapeau melon et s’en coiffa. Puis il s’arma d’un gourdin déposé derrière le comptoir pour tenir en respect ivrognes ou malfaiteurs.