Page:Malato - La Grande Grève.djvu/324

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— Messieurs, vous allez un peu loin ! exclama Pidurier, plus inquiet que furieux.

— Oui ou non, y a-t-il deux polices à Mersey : la vôtre et celle de la mine ? demanda Paryn.

— Oui, il y a deux polices. C’est tout naturel.

— Vraiment ?

— Certes ! vous imaginez-vous que c’est avec quelques agents et une demi-douzaine de gendarmes que je puis maintenir l’ordre parmi dix mille mineurs ?

— Maintenir l’ordre ! Dites les espionner, les provoquer, les pousser à bout ! Dites organiser des tueries comme celle d’aujourd’hui ! Je vous préviens que l’affaire n’en restera pas là ; elle ira loin.

— Elle peut aller loin. Monsieur le Préfet m’a confié une mission : le maintien de l’ordre…

— De l’ordre !

— Je la remplis.

— D’une jolie façon ! grommela Brossel.

— Le préfet saura ce qui s’est passé ; il le saura complètement, déclara Paryn. Je ne doute pas de son esprit de justice.

— Et puis, monsieur le commissaire, ajouta narquoisement Vallon, il y a les ministres, le Parlement qui comptent aussi pour quelque chose. Je sais bien que le baron des Gourdes considère Mersey comme son fief, mais vous n’ignorez sans doute pas que la féodalité est supprimée en France depuis le 4 août 1789.

— Comment se fait-il, ajouta Paryn, que l’organisateur connu du guet-apens d’aujourd’hui n’ait pas été interrogé par vous comme nous venons de l’être ?

— Il le sera, répondit le fonctionnaire perdant la tête.

Les orateurs éclatèrent de rire.

— Ah ! fit le maire de Climy, vous constatez, monsieur le commissaire, qu’il y a eu guet-apens organisé et que vous en connaissez l’organisateur. Je suis heureux de vous l’entendre dire devant témoins.