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Page:Malato - La Grande Grève.djvu/36

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Or, la jeune femme se sentait assez sûre d’elle pour ne point se réfugier sous la protection de son mari. Il n’y a que les créatures faibles qui appellent au secours en renonçant à se défendre elles-mêmes.

Aussi, lorsque le mineur rentra, lassé, noir de poussière de charbon et qu’il lui demanda, comme d’habitude, avant de se débarbouiller et de l’embrasser : « Rien de nouveau ? » elle répondit tranquillement : « Rien. »

Albert s’en fut dans l’autre pièce se laver au baquet empli d’eau tiède qu’il trouvait toujours prêt en rentrant ; puis il changea de vêtement : dix minutes après il reparut un autre homme, frais et blanc, dans une chemise et un pantalon propres, les pieds à l’aise dans des chaussons.

— La soupe est prête, dit Geneviève. Mais il faudra nous passer de vin jusqu’à samedi.

— Oh ! fit Albert, l’eau claire vaut bien la piquette et coûte moins cher.

Le frugal dîner fut bientôt expédié. Une soupe aux légumes, épaisse et odorante, en faisait tous les frais ; du moins y en avait-il à discrétion.

Albert finissait sa troisième assiette lorsqu’on frappa à la porte trois coups régulièrement espacés.

— Panuel ! fit-il, tandis que Geneviève courait ouvrir.

C’était, en effet, le menuisier. Geneviève offrit un verre de vin à leur ami, et ils causèrent des mineurs, de Chamot, de la question sociale.

Puis ils parlèrent de la Société de secours mutuels. Elle allait bien, comptant maintenant près de cinq cents adhérents ; une seconde réunion s’était tenue au bois des Brasses, Ronnot jugeant utile de changer chaque fois le lieu de rassemblement, et les affiliés avaient prêté le serment de ne révéler à personne les noms des sociétaires. Aussi Panuel, encore qu’on eût en lui toute confiance et qu’on l’eût même