Page:Malato - La Grande Grève.djvu/367

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riste blanchisseuse, essange, savonne, repasse, toujours active, égayant son travail de quelque chanson douce ou tendre. Car elle est heureuse : elle a retrouvé celui que, pendant si longtemps, elle a attendu le désespoir dans l’âme et toujours aimante, toujours fidèle.

Le bonheur a rallumé l’éclair de ses yeux, fait refleurir sur son visage la joie et les couleurs brillantes de la santé. Céleste, maintenant, est une femme de vingt-huit ans, un peu plus forte qu’autrefois, naturellement, mais toujours gracieuse. Sa beauté demeure souple et robuste.

Maintenant, réunie à l’homme qu’elle aime, elle rit, elle chante. L’horrible page noire du passé a été tournée. Le présent, ce sont l’amour et le travail, un travail incessant et qui, cependant, la laisse joyeuse, parce qu’il ne la sépare pas de son amant et s’exerce sans maître, au grand air, sous la clarté du ciel.

— Le linge est-il prêt ? demande Galfe.

— Tout est prêt, répond Céleste.

Soigneusement l’un et l’autre plient, épinglent, empaquètent les draps, les chemises, les mouchoirs, rendus à leur blancheur immaculée. Galfe empile tout ce linge dans une énorme corbeille qu’il charge sur sa tête et il s’en va livrer aux clients. Mais avant de quitter Céleste, il l’a serrée sur sa poitrine et embrassée longuement, comme il l’embrassera une heure plus tard en revenant : dans cette demeure les baisers pleuvent chaque jour, sans interruption, inépuisables. Et cela dure depuis deux ans.

Les événements dont a été remplie la première partie de ce récit nous ont forcés de négliger Galfe et Céleste, abandonnant celle-ci, établie fleuriste au Brisot, celui-là encore forçat à « la Nouvelle », où le décret de grâce était venu le trouver.

Rentrant en France sans autres ressources que sa « masse » du bagne, une centaine de francs, et son voyage payé jusqu’à Môcon, Galfe se fût trouvé dans