Page:Malato - La Grande Grève.djvu/463

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

d’importance secondaire. L’un de ceux-ci, Ballard, avait conduit à Mersey le troupeau des Brisotins.

L’autre groupe, qui arrivait non loin de la direction, mais du faubourg de Vertbois, comprenait Bernard, Sarrazin, Ouvard et une douzaine de syndiqués. Eux ne marchaient pas, mais couraient.

Comment ces derniers avaient-ils été prévenus de l’arrivée des Brisotins ?

Tout simplement parce que Sarrazin, n’ayant pas renoncé à la louable intention de casser la figure à Canul, s’était rendu derechef avant le lever du jour vers l’habitation du mouchard pour guetter la sortie de celui-ci. Et, caché derrière l’angle du mur, il avait entendu Canul ouvrir la fenêtre tout en répondant à une question de sa femme :

— Parce que les nouveaux vont arriver ce matin. Malheur ! les rouges vont faire une tête !

Ces paroles, qui ne laissaient subsister aucun doute sur le rôle du misérable, avaient tellement frappé Sarrazin, que, renonçant pour le moment à toute envie de détériorer le visage de Canul, il s’était précipité chez Bernard, dont la maison était la plus rapprochée.

À coups de pied et de poing dans la porte, il avait réveillé son occupant pour lui communiquer ce qu’il venait d’apprendre.

Bernard, plutôt ému que surpris, car il savait les efforts de la Compagnie, pour recruter des jaunes, s’était vêtu immédiatement, et, avec Sarrazin, rendu chez Ouvard. Là, ils avaient tenu conseil et décidé que le mieux était de se porter à la rencontre des arrivants pour tenter de les débaucher.

D’où venaient-ils ? C’est ce que Sarrazin ne pouvait leur dire, Canul n’ayant pas précisé ce point. Mais très vraisemblablement ils arriveraient par le chemin de fer. Un train du Nord devait entrer en gare à ce même moment : il n’y avait pas de temps à perdre.