Page:Malato - La Grande Grève.djvu/487

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

aux alentours de la ferme sous la surveillance d’un petit pâtre de douze ans. Du premier coup, il avait trouvé des débouchés non seulement dans la ville, mais dans les auberges des localités voisines où chaque après-midi la carriole attelée de « Touvenin » allait apporter du lait et des œufs.

Et maintenant, la chance le favorisant, Détras élargissait chaque jour le cercle de ses affaires. De plusieurs côtés, on lui ouvrait des crédits inattendus pour l’achat de bestiaux. Du matin au soir, lui, Geneviève, Panuel et Bénédic, le petit pâtre, ne cessaient d’aller et venir, soignant les animaux, livrant les produits de la Ferme. Malgré son éloignement pour l’idée de faire travailler des salariés, Détras, se rendant bien compte qu’ils ne pouvaient à eux trois suffire à tout, avait bien été obligé de prendre un aide. Du reste, Bénédic, orphelin de père et de mère, vivant misérablement auprès d’un oncle, mineur qui n’avait guère le temps de s’occuper de lui, se trouvait traité moins comme un serviteur que comme un jeune camarade mangeant à la table commune et couchant dans un lit propre. Pour lui, c’était le paradis succédant au purgatoire.

Sans avoir l’âme d’un thésauriseur, Détras voulait assurer aux siens la plus grande somme possible d’indépendance, et justement parce qu’il n’entendait exploiter personne, il était tenu à déployer plus d’intelligence et d’activité que tout autre. Le terrain et la maisonnette du bois de Faillan eussent constitué une excellente annexe de la Ferme nouvelle : Détras jeta les regards de ce côté-là.

Or, à ce moment, Galfe commençait à se trouver sérieusement gêné, non seulement par la pénurie de clientèle, mais aussi par suite des exigences du cadastre. Autour de Mersey, le sol augmentait de valeur ; des terrains jadis inutilisés et que la commune laissait à la disposition du premier venu voulant s’y construire une masure, étaient taxés à un