Page:Malato - La Grande Grève.djvu/99

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Dans la sérénité de la nature, sous le ciel clair, où montait, doucement grisante, l’exhalation des plantes et des fleurs champêtres, il se retrempait, puisait des forces pour la lutte, cette lutte politique vers laquelle il se sentait invinciblement attiré.

Déjà il était devenu populaire dans le département de Seine-et-Loir. Les mineurs de Mersey n’avaient pas oublié son activité courageuse, puis ses tentatives réitérées pour obtenir la grâce des mineurs forçats.

Le jour où, désireux de vivre en dehors du souci des affaires, dans une retraite tranquille et dorée, Chamot avait remis au baron des Gourdes le gouvernement de son royaume industriel, il avait dit à son successeur :

— Les mineurs de Mersey sont matés pour de longues années, je l’espère, mais prenez garde à ce docteur de Climy qui vient se mêler de nos affaires. Je sens en lui un adversaire dangereux.

— Ne craignez point, avait répondu des Gourdes, nous l’écraserons.

Et si la baronne n’avait rien ajouté aux paroles de son mari, son regard aigu comme une pointe d’acier en disait long sur ses pensées.

C’est que le mariage lui avait donné le rôle directeur qu’elle ambitionnait depuis longtemps. Finie la jeune fille effacée et muette ! C’était maintenant une femme dominatrice, toute volonté et ambition, qui régnait à Mersey, elle et des Gourdes ne faisant qu’un en deux personnes.

Sans être de nature cruelle ni même méchante par plaisir, elle eût, pour arriver à son but, marché sur n’importe qui, indifférente à tout ce qui n’était pas la réalisation de son idée.

Avec une activité d’esprit remarquable, elle aidait et conseillait son mari, enchanté d’avoir rencontré pareille collaboratrice. Elle eût voulu le voir député, vivant à Paris, où elle tiendrait salon, tandis que