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Page:Malato - Révolution chrétienne et Révolution sociale, Savine, 1891.djvu/160

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empêche que le riche ne soit massacré par le pauvre. »

L’absorption ou, pour mieux dire, l’étouffement de la Révolution française par Bonaparte fut un phénomène à la fois d’ordre politique, économique et moral.

D’ordre politique, — psychologique en même temps, — l’exaltation n’est jamais de longue durée ; le corps social, après d’aussi fortes oscillations, tendait à reprendre son centre de gravité. À l’enthousiasme pour les choses neuves, pour les constitutions, pour les droits, pour la patrie en danger, avait succédé la fatigue des orages révolutionnaires, l’énervement des harangues grandiloquentes, des cérémonies théâtrales, des drames et des comédies parlementaires, la haine des taxes et du maximum pour les commerçants, du cours forcé pour ceux que l’on payait en assignats, des mesures vexatoires pour tous.

« La France, disent les frères de Goncourt (Histoire de la Société française pendant le Directoire), lasse de dieux, de tribuns, de héros, de bourreaux ; lasse de luttes, d’efforts, de cris, d’anathèmes, d’enthousiasmes, de fièvres, d’ivresses, de tempêtes, de triomphes, d’angoisses ; — la France lasse de révolutions, de coups d’État, de constitutions, de législatures, lasse de 10 août, lasse de Thermidor, lasse de prairial, lasse de Fructidor ; — lasse de vaincre, lasse d’être sauvée ; — la France lasse de Belgique soumise, d’Italie conquise, la France à qui toutes les aigles d’Allemagne portées aux Invalides ne feraient pas tour-