Page:Malato - Révolution chrétienne et Révolution sociale, Savine, 1891.djvu/200

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

clusions les plus subversives. « L’épargne », lui dit-on. Mais quelle épargne est possible pour celui qui n’a rien, pour le prolétaire soumis aux risques du chômage, de la maladie, des accidents ? Et, d’ailleurs, pour mettre de côté des sous, ne faut-il pas se priver, restreindre sa consommation, retrancher même du nécessaire ? Résultat direct, si tous les travailleurs économisent, baisse de la production et, par suite des salaires. Quel singulier remède, en outre, que de conseiller aux affamés de se serrer le ventre ! Le crédit ? les avances ? les matières premières ? Système inapplicable aux salariés des usines et qui ne peut garantir ceux même travaillant pour leur compte contre l’envahissement de la grande industrie. Et lorsque, médecins traitant la gangrène par la tisane de guimauve, des progressistes prétendent fournir aux ouvriers le moyen de vivre par les sociétés de consommation qui, supprimant les intermédiaires, diminuent le prix des vivres, avec quelle précision mathématique Lasalle démontre qu’il n’y a rien de fait, les salaires haussant ou baissant avec le prix des objets de consommation ! « Loi d’airain ! » proclame-t-il ; loi inéluctable qui, s’exerçant en vertu du mécanisme de l’offre et de la demande, force l’ouvrier à ne pourvoir qu’à ses plus stricts besoins matériels : juste ce qu’il faut pour subsister et se reproduire.

À travers les changements de la politique, les écroulements de régimes, les guerres, les émeutes, les révolutions, le socialisme continue sa marche. Un siècle aura suffi au débile enfant pour devenir le géant destiné, selon la prophétie de Henri Heine,