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des barricades aux abords de la Bastille, du canal Saint-Martin et dans les quartiers populeux. Sur les boulevards, des coups de feu sont tirés, des postes désarmés. La rive gauche fermente : une foule de misérables envahit le Panthéon.

L’assemblée constituante frémit non de remords, mais de peur ; le massacre prémédité, qui débarrassera la société des importuns réclamant leur place au banquet, ce massacre pourrait bien tourner en défaite pour le pouvoir, en victoire pour l’insurrection. La garde nationale paraît d’un médiocre secours ; la troupe pourrait bien mettre crosse en l’air comme en février. Mais des adolescents grisés de bruit et de poudre seront d’excellents bourreaux : la garde mobile est lâchée.

Ces enfants du peuple, qui ignoraient pourquoi ils se battaient, se battirent bien : au grand ravissement de la bourgeoisie, ils furent implacables. « Cette garde mobile, jeunesse de Paris arrachée à l’émeute, écrivit Lamartine, a sauvé Paris et la France. » Entraînés par l’exemple, les autres corps massacrèrent consciencieusement : « Sabrez-moi cette canaille ! » hurlait le général républicain Clément Thomas. La canaille, c’étaient les combattants de février, auxquels l’Assemblée devait de vivre.

Cette bataille, qui dura trois jours pleins, coûta la vie à l’archevêque de Paris, Auguste Affre, tué devant le faubourg Saint-Antoine alors que, fidèle aux traditions de l’Église, mû peut-être par un mouvement de sincérité, il invitait les insurgés à déposer leurs armes pour reprendre le collier d’esclavage : toujours la vieille formule chrétienne « soumission ».