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Page:Malato - Révolution chrétienne et Révolution sociale, Savine, 1891.djvu/225

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à la lutte aucune part effective, subit le même sort : il était socialiste ! De même pour le docteur Tony-Moilin, publiciste de talent très aimé dans son quartier. Le 28, ce fut le tour de Varlin, ouvrier actif, intelligent, de grand cœur, qui consacra sa vie à l’affranchissement de ses frères. Il s’était efforcé d’empêcher le massacre des otages et fut arrêté sur la dénonciation d’un prêtre ! Traîné sous les injures et les coups d’une foule animalisée que la peur rendait féroce, frappé, déchiré, sanglant, il gravit, véritable calvaire, la montagne de Montmartre et jugé, condamné séance tenante, tomba foudroyé à quelques pas de l’endroit où, le 18 mars, étaient tombés Clément Thomas et Lecomte.

Les guerres civiles sont les seules logiques car, dans un camp au moins, celui des révoltés, on sait pourquoi l’on se bat ; mais elles sont aussi les plus impitoyables. Il ne s’agit plus d’un différend qu’on pourra régler par voie diplomatique après quelques coups échangés ; il s’agit d’une idée absolue qui doit dominer ou disparaître. L’enthousiasme, cette forme du fanatisme, est bien plus surexcité : en même temps, les passions s’aiguisent davantage. Quoi, cet homme, qui parle ma langue, qui coudoie ma vie, ne pense pas comme moi ! Quoi, cet autre, riche qui m’éclabousse dans la rue ou pauvre dont la misère m’offusque, ose opposer ses intérêts aux miens ! Ce fonctionnaire me défie, ce voisin me nargue, cette femme me dédaigne, affaire d’opinions, de parti ou de caste. Et le contact prolongé de ces éléments antagonistes d’incuber un conflit, qui latent d’abord, se transformera en guerre sans pitié.