Page:Malato - Révolution chrétienne et Révolution sociale, Savine, 1891.djvu/226

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Jamais, depuis le sac de Magdebourg par Tilly, ville n’avait offert un spectacle comparable à celui de Paris, conquis après une bataille de sept jours par les troupes de Versailles. À chaque coin de rue, on fusillait ; des colonnes de prisonniers s’engouffraient dans les casernes pour n’en plus ressortir. Au Père-Lachaise, on tuait à la mitrailleuse, système plus expéditif. Les dénonciations pleuvaient : on dénonçait par vengeance, on dénonçait par peur, on dénonçait par dilettantisme. Les promeneurs se dévisageaient avant de s’aborder ; débiteurs et créanciers tremblaient de se rencontrer. Dans ce concert de délations, les marchands de vins et les concierges firent rage. La presse conservatrice, saisie d’un délire rouge, la presse républicaine avancée, muette de peur, tremblante d’être compromise si elle élevait la voix, furent immondes.

Livré aux bourreaux après la bataille, comme l’avait été son collègue Varlin, Ferré fut condamné à mort, par le 3e Conseil de guerre siégeant à Versailles ; il eut pour compagnons de supplice, au poteau de Satory, Rossel et Bourgeois. Ces trois hommes étaient bien différents : le premier, en qui revivait l’âme ardente des hébertistes, ne fléchit pas un instant : il montra devant ses juges un indomptable mépris. Plus que tout autre, il avait tenu la main aux mesures révolutionnaires ; plus que tout autre, il fut en butte aux accusations souvent contradictoires de témoins ivres d’un beau zèle gouvernemental. Rossel, officier patriote et ambitieux, fourvoyé dans un soulèvement prolétarien qu’il ne comprit pas et qu’il abandonna en route, fut condamné mal-