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Page:Malherbe - Œuvres, éd. Lalanne, t5, 1869.djvu/17

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PREFACE

Quand Malherbe naquit (1555), Marot étail mort depuis onze ans, Calvin avait quarante-six ans, Ronsard et du Bellay chacun trente et un, Montaigne vingt-deux, des Portes neuf. Calvin devait vivre encore neuf ans, Ronsard trente, du Bellay cinq, Montaigne trente-sept, des Portes cinquante et un. C’est du vivant de Malherbe que naquirent successivement, dans l'ordre où nous les nommons, d’Urfé (l’auteur de l'Astrée), Régnier, Balzac, Descartes, voiture. Corneille, Mlle de Scudéry, la Fontaine, Molière, Pascal, Bossuet. Il avait dix-huit ans à la naissance de Régnier, mort quinze ans avant lui, quarante et un à celle de Descartes, cinquante et un, soixante-six, soixante-sept, soixante-huit, soixante-douze, quand vinr nt au monde, se suivant de près. Corneille, la Fontaine, Molière, Pascal, Bossuet. Boileau naquit huit ans après sa mort, Racine onze, la Bruyère seize, Fénelon vingt-trois. Il venait seulement de quitter ce monde quand Corneille fit jouer sa Mélite, entre laquelle et le Cid, date immortelle, il ne s’est écoulé que sept ans, et le Cid fut suivi presque immédiatement, à moins d’une année de distance, de ce ferme et imposant modèle donné par Descartes à la prose française dans son Discours de la Méthode, que vingt ans à peine séparent des Provinciales.

Pour entreprendre la réforme qui fut la tâche et l’honneur de Malherbe, il était impossible de venir plus à propos, à plus juste et plus opportune distance entre la fleur et la moisson, entre les promesses du seizième siècle et leur accomplissement par les grands génies du dix-septième.

Parmi les écrivains célèbres de notre langue, il en est peu dont on ait dit plus de bien à la fois et plus de mal que de Malherbe, soit de son vivant, soit depuis ; et il faut convenir que peu prêtent autant, selon la nature des esprits qui les jugent et le point de vue où ils se placent, soit à la critique, soit à l’éloge. Ajoutons que bien plus nombreux sont aujourd’hui les esprits sensibles aux défauts de notre auteur et insensibles à ses mérites, que ceux que touchent ses bonnes qualités et ses services. Dans les lettres, comme dans bien d’autres parties de l’activité humaine, arrêter, contenir, se conte