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STANCES.

Tant la Fortune avoit d’empire,
Que le soir nous verrait pleurer.

De toutes parts sont éclaircis
Les nuages de nos soucis ;
La seureté chasse les craintes,
Et la Discorde, sans flambeau,
Laisse mettre avecques nos plaintes
Tous nos soupçons dans le tombeau.

Ô qu’il nous eust cousté de morts,
Ô que la France eust fait d’efforts
Avant que d’avoir par les armes
Tant de provinces qu’en un jour,
Belle reine, avecques vos charmes,
Vous nous acquerez par amour !

Qui pouvoit, sinon vos bontez,
Faire à des peuples indomtez
Laisser leurs haines obstinées
Pour jurer solemnellement,
En la main de deux hyménées,
D’estre amis eternellement ?

Fleur des beautez et des vertus,
Aprés nos malheurs abbatus
D’une si parfaite victoire,
Quel marbre à la postérité