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STANCES

Luy fist faire ce qu’on désire,
Qui devoit le fléchir avec plus de couleur
Que ce fameux joueur de lyre
Qui fut jusqu’aux enfers luy montrer sa douleur ?

Cependant il eut beau chanter,
Beau prier, presser et flatter,
Il s’en revint sans Eurydice ;
Et la vaine faveur dont il fut obligé
Fut une si noire malice
Qu’un absolu refus l’auroit moins affligé.

Mais, quand tu pourrais obtenir
Que la mort laissast revenir
Celle dont tu pleures l’absence,
La voudrois-tu remettre en un siécle effronté
Qui, plein d’une extrême licence,
Ne feroit que troubler son extrême bonté ?

Que voyons-nous que des Titans,
De bras et de jambes luttans
Contre les pouvoirs légitimes,
Infâmes rejetions de ces audacieux
Qui, dedaignans les petits crimes,
Pour en faire un illustre attaquèrent les cieux ?

Quelle horreur de flamme et de fer
N’est esparse, comme en enfer,