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Page:Mallarmé - Œuvres complètes, 1951.djvu/1282

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velles, quand leur mission est accomplie. Génératrice de toutes choses, la terre apparaissait aux anciens comme un être conscient, possédant le don de la pensée, de la vue, et même du langage : aussi la nef parle. Quant à la toison d’or, voyez-y le vêtement d’or (ou les rayons) du soleil, lequel réapparaît dans la robe donnée par Hélios à Médée : ces rayons peuvent ou chauffer ou brûler ceux qu’ils viennent à toucher. C'est la même robe que donne Nessos à Déjanire, et qui consume le corps d’Héraclès. Médée, enfin, incarne un être possédant cette sagesse, qui appartient à Phoibos Apollon par droit de naissance. Cette sagesse, Asclépios et Tantale en héritent, en tant que représentant les secrets cachés de Zeus (le ciel) : appliquée à Médée comme à une femme sage ou instruite, elle suggère une idée de sorcellerie et de magie. Tout cela n’explique guère l’histoire du dragon ! N’y voir en effet qu’une autre version, rapportée ici, des pierres changées en hommes dans l’histoire de Deucalion. Détails. Ætès poursuit Argo dans sa retraite, parce que les Gorgones chassent Persée, comme on peut dire des ténèbres qu’elles chassent le soleil; et il les laisse derrière soi quand il s’élève dans le ciel. Ces pouvoirs dispensateurs de la vie que possède Médée, s’expliquent; car le même soleil qui cause une sécheresse mortelle, rappelle aussi les choses à la vie après l’assoupissement de la nuit et le long sommeil de l’hiver. Aussi, Médée, comme Tantale et Lycaon, est-elle capable de tuer; et, comme Asclépios et Héraclès, de rendre les morts à la vie. Le char à dragons de Médée demeure bien le même char d’Indra, d’Hélios et d’Achille. Celui d’Indra est traîné par les Harits (qui dans les légendes occidentales deviennent les Grâces) ; celui d’Hélios et d’Achille, par des chevaux immortels : au char de Médée s’attellent des dragons, parce que le mot dragon signifiait « quelqu’un à la vue perçante » : et ce nom s’appliquait naturellement à des créatures que l’on supposait convoyer le soleil à travers les cieux. LE CONTE DE TROIE a Guerre. — Le conte de Troie ou d’Ilion consiste en cette série de légendes dont l’ensemble forme l’histoire mythique de Paris, d’Hélène, d’Achille et d’Odyssée, l’Ulysse latin. Sachez bien qu’il n’est point, tout entier, contenu dans l’Iliade et V Odyssée, appelées généralement les poèmes de Homère; mais certaines expressions et des allusions semées tout le long des poèmes, semblent indiquer que les poètes savaient nombre d’incidents dont ils ne se souciaient pas toujours de parler.