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Page:Mallarmé - Œuvres complètes, 1951.djvu/1463

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étrange du mystère. Et mon vers, il fait mal par instants et blesse comme du fer 1 J’ai, du reste, là, trouve une façon intime et singulière de peindre et de noter des impressions très fugitives. Ajoute, pour plus de terreur, que ces impressions se suivent comme dans une symphonie, et que je suis souvent des journées entières à me demander si celle-ci peut accompagner celle-là, quelle est leur parenté et leur effet... Tu juges que je fais peu de vers en une semaine... » Mallarmé avait fait part de son dessein dramatique non seulement à quelques-uns de scs amis intimes, mais même à l’un de ses maîtres : la preuve en est dans la lettre que, le vendredi 31 mars [1865] Théodore de Banville lui adressait : « Je ne saurais trop vous féliciter, mon cher ami, de l’excellente idée que vous avez de faire une Hérodiade, car le Théâtre-Français a justement ce qu’il faut comme décor pour la monter et ce serait une grande raison pour être reçu ; ce qui fait généralement obstacle pour les pièces poétiques, c’est la crainte de dépenser de l’argent en vue d’un résultat incertain. Tâchez que l’intérêt dramatique y soit, avec la poésie, car vous ferez plus pour notre cause en combinant votre pièce de façon à ce qu’elle soit reçue et jouée qu’en la faisant plus poétique et moins jouable ! » Il est malheureusement impossible de savoir quelle suite de pensées ou quelle rencontre soudaine attacha Mallarmé à ce sujet. On peut voir dans ce premier envoûtement de Mallarmé par le personnage d’Hérodiadc, soit un écho de la Salammbô de Flaubert, parue dix-huit mois auparavant, soit, comme l’a suggéré Albert Thibaudet, un prolongement des vers de Baudelaire dans un sonnet sans titre : Ses yeux polis sont faits de minéraux charmants Et dans cette nature étrange et symbolique Où l'ange inviolé se mêle au sphynx antique, Où tout n'est qu'or, acier, lumière et diamants Resplendit à jamais comme un astre inutile Ea froide majesté de la femme stérile. On retrouve dans Hérodiade : ... Observant la froideur stérile du métal, ... j'aime l'horreur d'être vierge... ...................en la chair inutile... On trouve un indice, peut-être, d’Hérodiade à l’acte II, scène iv de Diane au Bois de Théodore de Banville, jouée en octobre 1863 à l’Odéon, et dont Mallarmé avait lu ces vers : Celle dont le glacier vierge était le royaume... ... Et, vierge, tu trouvais au lys une souillure.