Page:Mallarmé - Œuvres complètes, 1951.djvu/1629

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M. C. Cuénot, dans son article, montre, par la comparaison de deux passages du Meurtrier par amour filial de Mary Summer et du Portrait enchanté que Mallarmé en a tiré, combien le second auteur suit parfois de très près le premier. « Toutefois, ajoute M. C. Cuénot, ce serait une erreur de croire que Mallarmé s’cst contenté de retoucher par ci, par là. Il a opéré des modifications de détail et d’ensemble particulièrement révélatrices de son génie... Tout le travail, si profond et si curieux, qu’a opéré Mallarmé sur la langue, apparaît ici en pleine lumière.... Une première lecture courante nous révèle la tendance à condenser la phrase, — la tendance à l’inclusion, le désir de bouleverser l’ordre des mots, soit pour créer la surprise et remettre en valeur « les mots de la tribu », soit pour calquer l’ordre psychologique réel, soit simplement pour le plaisir de changer, — l’effort pour juxtaposer et non subordonner (le poète escamote les relatifs quand il le peut), — la haine du verbe, réduit à des passés simples et à des présents ou à des formes nominales, tandis que le verbe être tend à disparaître régulièrement, comme si certaines catégories linguistiques étaient frappées d’interdit, — l’horreur de la multiplicité et du signe de la multiplicité, le pluriel, — l’extension de sens de mots-outils très vagues comme la préposition à, et bien d’autres tendances encore. » Et M. Cuénot relève, en outre, comment Mallarmé s’est amusé à changer l’ordre suivi par Mary Summer, pour satisfaire à son goût des brusques débuts, et des interversions saisissantes, empruntées à la technique du théâtre. « Tantôt Mallarmé ajoute une métaphore, une comparaison, une description délicatement précieuses ou sensuelles, de brèves analyses psychologiques qui ne sont pas dépourvues de malice... » « Tantôt enfin le génie de Mallarmé se donne libre cours, oubliant le conte en de magnifiques intermèdes, qu’il s’agisse du finale, d’une préciosité délicieusement contournée, de Nala et Damayanti, ou de l’extraordinaire ballet à la fin du Mort vivant. » Voir aussi Jacques Scherer, Notes sur les Contes indiens de Mallarmé {Mercure de France, icr avril 1938, pp. 102-116). LA A1USIOUE ET LES LETTRES (Paris, 1894.) Publié en 1895 chez Perrin et Cie, ce petit volume comprend deux morceaux : Déplacement avantageux qui parut, en partie sous le titre Z? Fonds littéraire, dans le Figaro du 17 août 1894, en partie sous son titre dans la Revue Blanche d’octobre 1894 et la Musique et les Lettres qui avait paru dans la Rei'ue Blanche d’avril 1894 préeédé de la rubrique : Lecture d’Oxford et de Cambridge. C’est un professeur français, alors à Oxford, Charles Bonnier, qui est à l’origine du voyage de Mallarmé aux universités anglaises et de la publication de cette conférence.