Page:Mallarmé - Œuvres complètes, 1951.djvu/294

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grâce des choses fanées » ? Les objets neufs te déplaisent; à toi aussi, ils font peur avec leur hardiesse criarde, et tu te sentirais le besoin de les user, ce qui est bien difficile à faire pour ceux qui ne goûtent pas l’action. Viens, ferme ton vieil almanach allemand, que tu lis avec attention, bien qu’il ait paru il y a plus de cent ans et que les rois qu’il annonce soient tous morts, et, sur l’antique tapis couché, la tête appuyée parmi tes genoux charitables dans ta robe pâlie, ô calme enfant, je te parlerai pendant des heures; il n’y a plus de champs et les rues sont vides, je te parlerai de nos meubles... Tu es distraite ? (Ces toiles d’araignées grelottent au haut des grandes croisées.) LE DÉMON DE L’ANALOGIE Des paroles inconnues chantèrent-elles sur vos lèvres, lambeaux maudits d’une phrase absurde ? Je sortis de mon appartement avec la sensation propre d’une aile glissant sur les cordes d’un instrument, traînante et légère, que remplaça une voix prononçant les mots sur un ton descendant : « La Pénultième est morte », de façon que La Pénultième finit le vers et Est morte se détacha de la suspension fatidique plus inutilement en le vide de signification. Je fis des pas dans la rue et reconnus en le son nul la corde tendue de l’instrument de musique, qui était oublié et que le glorieux Souvenir certainement venait de visiter de son aile ou d’une palme et, le doigt sur l’artifice du mystère, je souris et implorai de vœux intellectuels une spéculation différente. La phrase revint, virtuelle,