Aller au contenu

Page:Mallarmé - Œuvres complètes, 1951.djvu/808

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

ces four-in-hands n’étaient-ils pas, dans leur galop soulevant le tourbillon des feuilles d'automne, suivis par un cortège de reporters, l’œil à la vitre et le crayon aux doigts ? La presse quotidienne a, tout entière et jour par jour, répandu des détails lus maintenant dans les bourgades et dans les hameaux épars. Tard venu, il me reste à faire des observations; mais qui les écouterait, dans cette France qui n’est qu’un vaste Paris, traversé par des rivières, des bois et des montagnes ? Une seule (je la ferai), relativement à l’unanimité apportée par mes confrères grands et petits ou moyens à louer l’amour visible de Son Altesse Royale pour les enfants, ce qui me ravit. Mais sur quoi base-t-on ce fait désormais acquis à la légende ? Sur ceci : que, dans ce grand château de Dampierre où les chefs-d’œuvre éternels de l’art revêtirent eux-mêmes un air de fête pour saluer sa venue, le visiteur illustre se baissa vers le jeune duc de Luynes, âgé de sept ans, et (je cite) le combla de gâteaux. Trait digne de louanges, soit! mais quant à moi, je ne puis me dissimuler que, tout excellentes que fussent les pâtisseries prises à une des assiettes de vieux Chine armorié en Chine du somptueux dessert, elles ne représentaient pas, ces deux meringues à l’ananas et cette tartelette, un cadeau fort différent de celui que j’apporte quelquefois de chez le pâtissier célèbre aux enfants d’un ami. Oui, c’est de la part du journalisme à grand format un motif peut-être un peu faible d’affirmer la générosité d’un prince envers l’enfance. Les naïfs, et j’en suis, chez qui l’idée du fils d’une reine éveille obstinément, même devant la réalité, mainte idée d’éblouissement et de prodige, regretteront une supposition faite par eux peut-être avant que d’achever la lecture de cette anecdote. A savoir que le prince avait présenté à l’enfant, confit par quelque procédé rapporté de Lahore ou de Singapour, un des diamants dont il doit être couvert, sur les mains, sur la robe, sur les pieds : seul bonbon digne que l’offre d’un souverain même futur au descendant d’une des plus magnifiques familles d’une nation amie. Mais quoi! voici que loin d’y vivre continuellement et de fouler eux-mêmes la pompe extraordinaire de son décor, ces princes, comme nous-mêmes, éprouvent, après les chasses, avant les galas, après Chantilly, avant Heilles-Mouchy, le besoin d’aller voir une Féerie au théâtre. Fidèle à ma promenade parisienne du Boulevard, c’est simplement, l’autre jour, à Orphée aux Enfers, que j’aperçus l’héritier du trône d’Angleterre. Dans une loge, lui qui venait de voir sept châteaux, leur splendeur et des lieux d’intervalle, apparaître et disparaître en l’espace de trois jours ! il applaudissait, enfin, de vrais changements à vue (ceux-là qui, pour prodiguer la toile, le gaz et le paillon, ne demandent