jusque maintenant comme de ceux qui l’ont créé, plus de maîtrise, plus de fougue enjouée et d’aisance divine. A vous de plonger les yeux, Mesdames, dans ces tableaux profonds à l’égal de miroirs, où vous croirez toujours un peu vous contempler : car il n’est pas une petite fille assise aux bancs du pensionnat qui ne porte en elle une goutte de cc sang éternel et royal qui fit les grandes princesses d’autrefois. Harmonieux, fervent et sage, œuvre d’un âge enthousiaste qui se baigna au flot antique et d’un âge savant qui plane dans les cieux supérieurs, le livre de M. Emmanuel des Essarts, poète et l’un des professeurs éloquents du jour, s’ouvre par ce groupe de composition : Ees Chercheurs d’idéal et finit par un autre placé sous cette invocation : Excelsior. Mélancolies ou joies puisées dans la rêverie et l’imagination seules, telle est encore la partie moyenne et vivante des Élévations : Symboles et Tableaux. Les heures graves de l’existence, mais hardies, aux élans déjà tempérés par le souvenir, sont celles que va charmer cette lecture. Le Harem : titre un peu vif peut-être pour quelques dames françaises, donné par M. d’Hervilly à son dernier livre de poésie. Qu’aucun éventail ne s’agite, effarouché : car ce gynécée tant que le tome qui l’emprisonne en ses stances demeure fermé sur votre étagère, va et vient, rit et babille aux climats divers, libre parmi les aiguilles de glace, les bananiers ou les obélisques roses. Par une loi supérieure à celle qui. chez les peuples barbares, enferme véritablement la femme entre des murs de cèdre ou de porcelaine, le Poète (dont l’autorité en matière de vision n’est pas moindre que celle d’un prince absolu) dispose avec la pensée seule de toutes les dames terrestres. Jaune ou blanche ou noire ou cuivrée, leur grâce est soudain requise par lui, quand il se met à l’œuvre; elle vient former les flottantes figures animant les livres, et. notamment cet album cosmopolite de vers dû à un voyageur (qui a surtout été de la place du Nouvel Opéra au premier lac du Bois de Boulogne). Secret, ô mes aimables lectrices, maintenant divulgué, de ces heures vides tout à coup et sans cause, et de ces quasi absences de vous-mêmes, auxquelles vous succombez quelquefois pendant l’après-midi; un rimeur quelque part songe à vous ou à votre genre de beauté. A ce volume qui date d’avant le retour à la Ville (mais était-ce bien son temps et faisait-il autre chose que de se tenir prêt pour le commencement de la Saison ?) il faudrait ajouter le Cahier Rouge, point encore paru quand j’écris ceci, et peut-être classé déjà dans toutes les bibliothèques au moment où on le lira. Nombre des morceaux qui composent ce recueil prochain de François Coppée ont été applaudis par des mains aristocratiques ou charitables dans les réunions
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