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Page:Mallarmé - Œuvres complètes, 1951.djvu/840

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parisien. Quant aux étoiles elles apparaîtraient à vos premières notes, comme s’éclaire le firmament, dans le crépuscule, au bruit de flûte du jeune pâtre. Sujet de tous les entretiens de l’heure, comme, il y a quelques mois, le furent des allées et venues mystérieuses à travers l’Europe qui se traduisaient par ces mots imprimés ou chuchotés : « M. Ha-lanzier revient de Naples, de Londres, de Vienne ou peut-être de Pétersbourg », voici qu’après la question des virtuoses, s’agite celle d’une partition! Faure (et Nilsson ?) je le vois, ou la devine, et il y aura la Sanghalli; mais dans quoi : en un opéra étranger jadis accueilli par les suffrages parisiens ? Non : tout cosmopolite que soit l’esprit qui préside à l’érection du monument composite, cette solution, relative au fait de l’inaugurer, pèche par quelque point : ou alors on ne pouvait faire qu’une seule chose, prendre absolument le Tannhauser, et, par un déploiement de gloire extraordinaire, le venger de l’outrage causé jadis au nom de la France par une centaine de malappris : solution plus impossible encore, depuis les armes, depuis l’Alsace, depuis le sang! Rêvée à la pose de la première pierre ainsi qu’une des solennités les plus sublimes du siècle, cette simple prise de possession d’un local ne peut guère aujourd’hui prêter à une réjouissance universelle comme les Expositions en ont indiqué l’aspect à l’avenir : ce n’est pas dans un ciel voilé seulement par l’niver que l’Apollon de bronze élève sa lyre d’or, mais parmi on ne sait quelle tristesse. Une vaste féerie, bonne à essayer la seène pendant que le public regarderait la salle, voilà l’idée dernière qu’il y a longtemps léguait, son œuvre achevée, à qui l’exploiterait, le génie perspicace de l’Archi-tecte : la pièce de circonstance, construite par M. Armand Sylvestre et que reproduisirent les journaux, répondait à ce dessein, avec quelque magnificence en moins, mais avec ce luxe inouï, paradoxal et ignoré en plus, des vers très-bien faits jaillissant sous la coupole d’un théâtre où l’on chante. Les mêmes feuilles (comme si elles n’étaient que notre pensée des soirs de coin de feu malicieusement, pendant l’heure du sommeil, saisie par d’indiscrets démons pour la divulguer au monde, le matin!) annoncent, au moment juste où nous écrivons, comme une décision obtenue de l’Administration, la propre thèse que nous voulions développer ici. A défaut d’un ouvrage français, exceptionnel et subjuguant l’Europe entière, pourquoi, comme il faut que le programme soit avant tout national, ne pas donner un extrait de quelques-uns de nos maîtres rares, à quoi j’ajouterais cependant un acte italien et un acte allemand : puisque ce fut notre génie de faire comprendre à l’Italie, à l’Allemagne et au monde les musiques allemande, italienne et française ? Gluck, Auber et Gounod, Meyerbeer et Rossini;