Page:Mallarmé - Divagations.djvu/130

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des premières pages qu’écolier je traçai dans la solitude, à la louange du dieu dont je choisirais, pour le célébrer aujourd’hui, de dire mieux la même chose ; ou ne la calquant sur le tour et une manière à lui propres et n’empruntant sa voix. « Si l’ esprit n’est gratifié d’une ascension mystique : las de regarder l’ennui dans le métal cruel d’un miroir, et cependant aux heures où l’âme rythmique aspire à l’antique délire du chant, mon objet est Théodore de Banville qui n’est pas quelqu’un, mais le son même de la lyre. Avec lui, je sens la poésie m’enivrer, que tous les temps ont appelée ainsi et bois à la fontaine de lyrisme. Fermé le livre, les yeux avec de grandes larmes de tendresse et un nouvel orgueil. Ce que d’enthousiasme et de bonté musicale et de pareil aux rois chante et j’aime ! j’aime naître, j’aime les lumineux sanglots des femmes aux longs cheveux, et je voudrais tout confondre dans un poétique baiser. Nul mieux ne représente maintenant le Poëte, l’invincible, classique Poète soumis à la déesse et vivant parmi le charme oublié des héros et des roses. Sa parole, sans fin, l’ambroisie, que seul tarit le cri ivre de toute gloire.. Les vents qui parlent d’effarement et de la nuit, les abîmes pittoresques de la région, il ne les veut entendre ni ne doit les voir : il marche à travers l’enchantement édenéen, désignant à jamais la noblesse des rayons et l’éclatante blancheur du lys enfant — la terre heureuse ! Ainsi dut